Sean Gilfillan est l’un des premiers soldats américains à entrer dans Bagdad en 2003. Quatre ans plus tard, il fonde le label To The Fallen Records (Disques à ceux qui sont tombés) et se met à publier des compilations. Son idée? Permettre à des militaires qui se sentent l’âme artistique d’envisager une autre vie, une autre carrière.  » Quand j’étais en Irak, déclare-t-il au Sunday Times, je me suis rendu compte qu’il y avait des tas d’excellents musiciens dans nos rangs. Beaucoup chantaient, rappaient, jouaient et s’enregistraient… Un grand nombre d’entre eux étaient vraiment bons, mais ils ne pouvaient pas vivre de leur passion.  »

Ces jeunes soldats avaient emmené avec eux une guitare voire des logiciels musicaux professionnels, se servant avant tout de la musique comme d’un moyen thérapeutique et sans jamais s’imaginer qu’un label se consacrerait un jour à lancer des artistes issus de l’armée. Des artistes rarement bien reçus par les maisons de disques traditionnelles.

Ça n’a pas été sans mal. Devant les réticences des banques, Gilfillan et sa femme ont hypothéqué leur maison, emprunté de l’argent à la famille et aux amis pour concrétiser leur projet. Rap patriotique, rock anti-Bush, ballade sur les horreurs de la guerre… To The Fallen Records a sorti 6 compiles. Deux hip-hop, 2 folk et 2 country. Rien de bien brillant mais les CD’s se vendent comme des petits pains dans les bases d’Irak et d’Afghanistan. Selon son géniteur, la société est économiquement viable et elle verse une part de ses profits à des £uvres de charité militaire.

Steven Covell, médecin dans l’armée, est l’un des artistes défendus par le label. On n’entend toujours rien venir, mais le garçon rêvait de devenir le nouveau James Blunt lorsqu’il quitterait l’armée en 2010. Avant d’écrire You’re beautiful et de devenir un songwriter pour midinettes, Blunt, issu d’une famille de militaires, a en effet servi dans l’armée britannique. Ca fait de bonnes histoires. Dans une interview à la BBC, il a notamment révélé avoir refusé l’ordre de s’emparer de l’aérodrome de Pristina occupé par les Russes alors qu’il était engagé avec les forces de l’Otan au Kosovo. Il se serait expliqué par cette phrase:  » Je ne vais pas rendre mes soldats responsables du déclenchement de la Troisième Guerre mondiale.  » Rien que ça?

En matière de soutien aux troupes, ces dernières années, on ne se souvient que de cruches comme Jessica Simpson dans le Golfe persique… Pendant la Seconde Guerre mondiale, les soldats ricains loin de chez eux avaient droit à Bing Crosby et aux Marx Brothers pour Noël. Depuis quelques années, ils doivent se contenter de rappeurs chrétiens, de songwriters inconnus et de majorettes des Dallas Cowboys.  » Juste après le 11 septembre, nous n’aurions pas eu assez d’avions pour envoyer tous les volontaires« , explique dans USA Today Wayne Newton, à la tête de The United Service Organizations Celebrity Circle, asbl qui fournit des loisirs aux membres de l’armée. Aujourd’hui, les célébrités ne veulent plus donner l’impression qu’elles soutiennent les conflits. D’autres ont peur, simplement.

Kid Rock et 50 Cent se sont tout de même rendus en Irak. Quant à Henry Rollins, il est l’un des rares derniers activistes de renom. En 2003, il tournait avec USO pour soutenir les soldats tout en étant contre la guerre. Se permettant même des remarques du genre:  » Votre commandant ne vous mentirait jamais. C’est le boulot du vice-président (Cheney à l’époque, ndlr) ». Plus récemment, il s’est investi dans des campagnes épaulant les vétérans à leur retour au pays. l

J.B.

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