Ils voyagèrent vers des pays perdus

11 novembre 1942. Suite au débarquement des Alliés en Afrique du Nord, les Allemands envahissent la zone libre et Pétain s’enfuit à Alger, changeant de camp et la donne. À Londres, siège de la France libre, c’est la consternation. Après avoir consulté une voyante, Charles de Gaulle quitte l’Angleterre, affrète un vieux rafiot sur lequel se pressent les derniers fidèles… et opposants: Joseph Kessel, Raymond Aron, Derrida. E la nave va… sans que personne ne sache vers où, si ce n’est l’impérieux chef déchu. Uchronie jubilatoire, ce récit est un roman à la phrase longue, élégante, érudite mais pas pédante, dont l’écriture est d’un classicisme assumé. De Gaulle y prend pour son grade de général: la statue du commandeur, si elle n’est pas déboulonnée, dévisse. Et en effet, le grand Charles a l’air statufié: granitique dans son mutisme, d’une volonté d’airain dans sa défense de la France, d’un orgueil aussi pesant que le bronze, il se révèle insensible ou presque aux sentiments, aux tentations amoureuses, et semble même résister aux affres de l’érosion des jours. Car du temps qui flétrit les volontés comme les amours, c’est de cela que parle ce livre, lequel ne se résume pas à un simple cabotinage à la surface des choses…

De Jean-Marie Rouart, éditions Albin Michel, 312 pages.

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