Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

DOCUMENTAIRE DE BIRGIT HERDLITSCHKE.

8

Une simple chanson peut-elle entrainer des changements politiques? Faire évoluer des mentalités? Influer sur l’opinion publique? « Donnez une chance à la paix? Désolé les mecs mais si c’est tout ce que vous avez à proposer, ça ne vaut pas mieux que ma grand-mère qui nous ordonnait de nous rabibocher », rigole l’un des intervenants de La pop peut-elle sauver le monde? en égratignant au passage John Lennon… Le documentaire de Birgit Herdlitschke s’ouvre en 1939 au Café Society. Billie Holiday y interprète Strange Fruit souvent considérée comme la première chanson contestataire moderne. Strange Fruit évoque le lynchage des noirs et ce soir-là, elle ne plaît pas à tout le monde. Même chez les gens de couleur… « Quand on vit le racisme au quotidien, on n’a pas envie d’en entendre parler pendant ses temps libres, commente un esprit avisé… Et c’est toute la question, les chansons contestataires ont-elles leur place dans le divertissement? » La réponse est oui. Et oui, aussi, elles ont exercé un rôle et continueront à le jouer dans l’évolution de nos sociétés.

Brossant un portrait panoramique menant de Pete Seeger à Lady Gaga en passant par Nina Simone, Boris Vian, Gil Scott-Heron, Bob Marley, Public Enemy, Bob Geldof, Bono, Kendrick Lamar et les Pussy Riot, La pop peut-elle sauver le monde? se présente comme une histoire de la chanson contestataire. Si Woody Guthrie, pour qui un morceau folk aborde un problème et apporte une solution, était syndicaliste et communiste, Bob Dylan a toujours estimé pouvoir être du côté du peuple sans se faire politique. « A l’époque, les gens écoutaient Combien coûte ce chien dans la vitrine? Ça ne reflétait pas notre réalité, se souvient-il. Le quotidien était morose. Dominé par la peur de voir exploser ce nuage noir qui allait tous nous tuer. A l’école, on nous apprenait d’ailleurs à nous glisser sous nos tables en cas d’alerte… » Inscrit dans le Summer of peace d’Arte, ce docu d’une heure et demie qui en folk, rock, rap, reggae et musiques électroniques raconte la lutte contre le racisme, la peur de la menace nucléaire et l’opposition à la guerre du Vietnam, pointe aussi les critiques que suscitent la chanson caritative et la variété humanitaire (« le monde est compliqué et Bono ne le connaît pas mieux qu’un autre »). Passionnant. Surtout avant qu’il ne s’appesantisse sur le cas allemand.

JULIEN BROQUET

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content