Michel Verlinden
Michel Verlinden Journaliste

LE MUSÉE IANCHELEVICI CONSACRE UNE EXPO EN TROIS ACTES À LA PEINTURE FIGURATIVE ACTUELLE. SEPT MOIS POUR OBSERVER UN GENRE QUI N’EN FINIT PAS DE SE RENOUVELER.

Des figurations

MUSÉE IANCHELEVICI, PLACE COMMUNALE, À 7100 LA LOUVIÈRE. DU 17/09 AU 12/03.

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C’est un beau projet, pensé sur un terme assez long, ce qui est plutôt plaisant en ces temps girouette, que dépliera le Musée Ianchelevici dès le milieu du mois de septembre. Consacrer trois accrochages, tout au long de sept mois, à la peinture figurative actuelle est un geste courageux qu’il convient d’applaudir. Des figurations s’articulent en trois volets distincts. Le premier d’entre eux fera place aux oeuvres de cinq peintres contemporains qui ont choisi l’horizon figuratif: Goran Djurovi, François Jacob, Laurent Lankmans, Agnès C.H. Peeters, ainsi que Julien Spianti. Le fil rouge? Officiellement, l’homme, la condition humaine à travers des compositions qui évoquent ou se réfèrent au monde du théâtre, du cinéma ou de la scène. Mais officieusement, on ne peut s’empêcher de penser qu’au-delà de ce ciment balzacien, le sol ferme qui soutient les oeuvres en question réside dans une maîtrise technique étonnante du médium. C’est flagrant chez le Belge Laurent Lankmans, dont l’univers tracé au stylo-bille évoque le cinéma expressionniste allemand, quelque part entre Le Cabinet du docteur Caligari et Nosferatu le vampire. Les ombres menaçantes et les visages à demi-éclairés rappellent en effet certaines séquences en stop-motion de Murnau. On pense également à l’esthétique forgée par un Hugo Steiner-Prag dont la postérité a retenu la contribution illustrée du célèbre Golem de Gustav Meyrink. On pointera également les toiles maniéristes de la Tournaisienne d’adoption Agnès C.H. Peeters. Ici, le goût pour le détail et le rendu invitent à faire un tour du côté des grands maîtres du passé. Fort heureusement, le propos dépasse la référence ou la citation en convoquant le proche et le quotidien d’une façon puissante. Mention aussi pour la palette chromatique troublante qui n’a pas son pareil pour frôler l’intime.

Acte 2, acte 3

Il faut presser le bouton « fast forward » pour entrevoir la suite du programme. À partir du 19 novembre, le musée de La Louvière fera place à un solo show dédié au travail du Serbe Goran Djurovi, dont le nom figure déjà au générique du premier acte. Au centre des toiles de ce peintre né à Belgrade en 1952: l’existence toute crue. Peinture à l’huile, vernis, tempera… ses toiles sont faites de strates résolument tournées vers le passé. Il n’en va pas de même pour le sujet des compositions emplies de matières vibrantes qu’il donne à voir. Celles-ci sont marquées par une sorte de huis clos assez angoissants pour le spectateur. Cerné de sombre, ces situations anxiogènes plongent l’oeil dans un univers à la Orwell. Au sein de celui-ci, on distingue des êtres englués dans des actions machinales, répétitives et hiérarchisées. Un vrai théâtre de l’absurde qui signe le triomphe des dominants et la défaite toujours plus humiliante des dominés. Le tout pour des images qui semblent être les « captures d’écran » d’une narration qui se perpétue depuis la nuit des temps. Heureusement, cette immersion décapante sera suivie du troisième et dernier acte, plus paisible celui-là, du projet global. Il s’agit de l’exposition des candidats au prix Jean et Irène Ransy, un concours qui s’adresse aux peintres figuratifs organisé par Hainaut Culture Tourisme. Une note légère que l’on ne boudera pas pour autant.

WWW.IANCHELEVICI.BE

MICHEL VERLINDEN

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