Fièvre de cheval

Dieu sait ce qui peut arriver lorsqu’on mise 10 euros sur Turbo, un « tocard » coté à 120 contre 1. Au PMU Le Platane, la quarantaine en vrac, Anatole respecte plus souvent qu’à son tour la consommation obligatoire toutes les 45 minutes. Rêvant d’être seul pour vider peinard son cerveau et son demi, il affine ses pronostics. Or, on n’échappe pas longtemps aux rituels de l’addiction, au ballet de ses habitués, chômeurs et retraités qui s’asticotent, au Sulky, au Quintésens, à La Croisée des saveurs, où ça fleure bon la pelouse. Dans ces bars où « on se compte, on se dévisage, on traque ceux qui, et parfois il y en a », Anatole collectionne les phénomènes. Enquiquineurs, loulous roublards, alcooliques repentis, il les attire, faut croire. Bref, Anatole perd tout et doit déjà se refaire, quand là, paf, c’est le début des emmerdes. S’adressant à son lecteur avec une gouaille jubilatoire, Sylvain Chantal fait chanter les jeux de mots à la sauvette du côté de la tireuse à Kronenbourg. On ne vous file pas sa délectable martingale, « car une méthode comme ça, implacable, sûre, on la garde pour soi, sinon tout le monde palperait, trop facile. Qu’est-ce que je disais? Oui, que je n’avais pas pu me concentrer. » Retenez juste que vous allez renverser de la mousse, prendre la poudre d’escampette pour échapper aux lascars, direction Sainte-Marguerite, joyau de la côte sauvage de la presqu’île guérandaise, que la patronne de l’hôtel vous refera la frise et la fraise. Un tuyau: misez deux heures sur Fièvre de cheval, c’est du gagnant-placé.

De Sylvain Chantal, éditions Le Dilettante, 160 pages.

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