Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

En partance du rap, Féfé a fait le break avec un premier album solo euphorisant, qui fait le pas jusqu’à la chanson. En concert, le 25/09, à Bruxelles.

« On ne change pas un vilain petit canard. » C’est certifié et chanté haut et fort par Féfé. A ses côtés, les gamins reprennent à la cantonnade. Et du coup, les vôtres aussi- « Féfé représente tous les vi-vi-vilains petits canards »-, ça vous change de René la Taupe, on l’avouera… VPC, le titre du morceau, a le refrain-anticyclone qu’il faut, et le message qui fait du bien.

Y a du soleil chez le rappeur, armé en permanence d’un sourire taille XXL qui découvre des dents de la chance. On imagine qu’il en a fallu, un peu, pour arriver là. Soit un premier album solo, Jeune à la retraite, disque d’or en France. Un album produit par Dan The Automator (Gorillaz, Handsome Boy Modeling School…), qui voit Féfé partir du hip hop pour filer tout droit vers la chanson, guitare en bandoulière.

Ce n’était pas gagné: quand le Saïan Supa Crew, formation majeure du rap français, se sépare en 2007, Féfé se retrouve un peu paumé. « Depuis un moment, je voyais bien tout le monde travailler sur ses propres trucs. Pas moi. Je n’avais jamais pensé à une carrière solo. En général, je doute pas mal. Et à ce moment-là encore plus. » Coup de blues. Féfé vient d’avoir 30 ans, « l’occasion d’un premier bilan, de questionner pas mal de choses », et pense alors à tout arrêter. « Mais l’idée me déprimait encore plus. » Il reprend donc la plume, mais gamberge. « Au niveau du rap, j’avais le sentiment d’avoir accompli un petit truc avec mon crew. Je ne me voyais pas refaire la même chose. » Le déclic a lieu quand il décroche la guitare que lui a offerte le chanteur Patrice, lors de l’enregistrement du dernier album du Saïan Supa Crew. « En m’y remettant, j’ai découvert de nouvelles perspectives. En fait, j’ai besoin d’une certaine innocence, avoir l’impression d’apprendre, et d’essayer des trucs. »

Les standards et la manière

La curiosité et l’ouverture d’esprit, Féfé a pu les tester très tôt. Né en 1976, Samuel Adebiyi de son vrai nom, a grandi dans le 93, à Noisy-le-Sec. Dans la cité, il est issu d’une immigration originale: africaine anglophone, ses parents sont nigérians. Entre 7 et 8 ans, il passe même un an en Angleterre. A la maison, le paternel collectionne les vinyles de soul music. Du coup, quand le gamin tombe sur le rap, il retrouve tous les samples piqués aux disques de son père. « Quand je me suis moi-même lancé dans le rap, j’ai directement voulu pondre mes propres productions, ne pas dépendre d’un DJ. «  Plus tard, après quelques premiers essais, il se retrouve embarqué dans l’aventure Saïan Supa Crew. Caractéristique du groupe: une envie de sortir des clichés dans lesquels le rap a commencé à s’enfoncer.

Cette exigence, Féfé ne l’a toujours pas laissée tomber. Avec ce paradoxe: vouloir s’éloigner du rap – « le genre est devenu tellement conventionnel, c’est désespérant »– tout en revendiquant en permanence son héritage: « Aujourd’hui, avec la guitare, je me suis aventuré vers un format plus proche de la chanson. Mais le hip hop continue d’être la base de tout. Y compris dans la façon dont j’aborde la musique: de manière insolente. Je ne connais pas une note de solfège, par exemple! » Et si c’était ça qui donnait à son Jeune à la retraite toute sa fraîcheur…?

Féfé, Jeune à la retraite, Universal. En concert (gratuit), le 25/09, au festival Expressions urbaines, à Ixelles.

Laurent Hoebrechts

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