De Wes Anderson. Avec les voix de George Clooney et Meryl Streep en vo, de Mathieu Amalric et Isabelle Huppert en vf. 1 h 28. Sortie: 17/02.

C’est l’histoire de Mr Fox (George Clooney impérial de suavité gentiment canaille), ancienne terreur des poulaillers mais rangé des affaires depuis que son épouse, Felicity (Meryl Streep, tout en charme pincé), lui a intimé de trouver une activité plus en accord avec sa prochaine paternité. Reconverti éditorialiste dans une gazette locale, notre renard a vu les années passer avec un ennui croissant, regardant pousser Ash, sa progéniture, d’un £il distrait.

Chassez le naturel, et il revient au galop. A moins, bien sûr, que ce ne soit là quelque forme carnassière de la « midlife crisis ». Installé avec sa famille à proximité des élevages de trois fermiers patibulaires, Boggis, Bunce et Bean, Mr Fox n’y tient bientôt plus et entreprend, en compagnie de Kylie l’oppossum, son comparse (Wally Wolodarsky, impayable), de les piller consciencieusement. Le festin a un prix, et la riposte ne se fait pas attendre, transformant la campagne anglaise en champ d’une bataille opposant les animaux, solidaires, aux humains, ivres de vengeance. Un combat inégal? Voire: c’est là, en effet, qu’il s’avérera que le charismatique et rusé Mr Fox a plus d’un tour dans son sac…

Du sur mesure

Wes Anderson s’aventurant sur le terrain de l’animation, image par image, encore bien, le postulat avait tout pour séduire. Le résultat est rien moins qu’épatant, le réalisateur ayant, à l’évidence, trouvé dans Fantastic Mr. Fox (Fantastique Maître Renard), classique de la littérature pour enfants de Roald Dahl (l’auteur, entre autres, de Charlie et la chocolaterie), un matériau à sa main, magnifié pour le coup par une technique taillée sur mesure pour son sens maniaque du détail.

Recourant à des marionnettes arborant fourrure et costume, Anderson met en place un univers chatoyant au sein duquel le spectateur plonge avec ravissement. L’animation en stop motion y apparaît moins désuète que délicieuse, dispensant, bien soutenue par une distribution vocale de haut vol, une gamme variée d’émotions. L’histoire imaginée par Roald Dahl n’y est bien sûr pas étrangère, qui présente à la fois les qualités et la simplicité d’un conte pour enfants. A quoi le cinéaste dandy réussit toutefois à imprimer sa griffe, pour signer une £uvre résolument « dahlienne » mais non moins « andersonienne ».

S’inscrivant dans le droit fil des Royal Tenenbaums et autre Life Aquatic, Fantastic Mr. Fox explore ainsi joliment les dynamiques familiales (et en particulier la relation problématique entre un père, immature par bien des aspects, et son fils), en même temps que s’y déploient divers motifs chers à l’auteur, des plans réputés infaillibles aux excentricités assumées, en passant par un humour volontiers laconique. Sans oublier ces éléments stylistiques – tempo, bande-son, cadrages – qui donnent sa coloration à son univers, lequel, par sa finesse et sa précision, évoque l’£uvre de quelque miniaturiste. Parenthèse (enchantée) dans sa filmographie, peut-être, Fantastic Mr. Fox n’en témoigne pas moins de la cohérence et de la singularité du cinéma d’Anderson. On quitte son monde fantastique à regret, mais porté par un doux sentiment d’euphorie. Si ce n’est déjà le film de l’année, voilà qui y ressemble en tout cas très fort.

Jean-François Pluijgers

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