Descente aux enfers

Précurseur du jeu vidéo indé, Capybara Games creuse la roche et explore des cathédrales minérales souterraines dans Below. Une plongée vénéneuse.

Appréhender la scène exige une poignée de minutes: perdue au milieu d’un océan noir, au coeur de son tumulte, une frêle embarcation fend la houle. Noire, la séquence d’introduction de Below annonce la couleur. Le gamer, en route vers une île aux souterrains infinis, y évoluera comme un détail de quelques pixels perdu dans de vastes caves. Descendant des Zelda classiques en huit bits, ce jeu d’action et d’aventure se montre nettement plus vachard que ces classiques de Nintendo. De quoi souligner notre insignifiance, face à la nature.

Studio canadien auteur de cette vénéneuse exploration, Capybara Games n’est pas un petit joueur dans le monde du jeu vidéo indé. L’équipe est moins célébrée que Jenova Chen ( Flower) ou Jonathan Blow ( Braid), mais son Superbrothers: Sword & Sworcery EP ne posait pas moins les fondements de la révolution indé, il y a huit ans. Au-delà de cette fable naturaliste au pixel art longiligne, le studio de Toronto joue également dans la court mainstream. Son Might & Magic: Clash of Heroes (édité chez Ubisoft) se dresse ainsi comme un jeu commercial mais intelligent, entre Tetris et stratégie tactique.

Sans texte et encore moins de dialogues, Below tangue du côté hardcore du jeu vidéo. Le titre file entre exploration, combats en temps réel et crafting. Son héros anonyme armé d’une épée, d’un bouclier et d’un arc à flèche évoque a priori Link. Mais la comparaison s’arrête là. Car ce jeu miniature cache mille mécaniques -non expliquées- que le gamer devra assimiler, à force de morts à répétition.

Mélodie en sous-sol

Veinées de détours piégeurs, les galeries souterraines et labyrinthiques de Below dissimulent avec malice une foule de détails. Des pics jaillissent du sol, un chemin caché ne se découvre qu’en allumant une torche. Drapé de sublimes bancs de brume, le titre décline 50 nuances de noir. L’iris s’ouvre pour percer une obscurité éternelle. L’ouïe s’aiguise. Tendre l’oreille est crucial pour, entre autres, détecter le cri de chauves-souris, promesses d’un repas vital. La guitare du chanteur folk canadien Jim Guthrie berce parfois l’action de Below. Mais l’urgence domine. S’épuisant continuellement, la jauge de faim et de soif menace sans répit les points de vie du gamer. Des crabes luminescents, un cyclope géant et des morts-vivants dansent également six pieds sous terre pour grignoter le héros. Combiner, au petit bonheur la chance, une foule d’objets trouvés en chemin se révèle vite nécessaire pour se soigner ou tout simplement éclairer sa route.

Habités de monstres presque anodins en début d’aventure, Below capture doucement l’imaginaire au fil de sa descente aux enfers. Ses flous artistiques exquis se teintent d’un bleu minéral. Des roches cubiques vivantes dansent sur les pas du joueur. Des géométries ésotériques d’une civilisation mystique tracent une classe graphique folle. Mais chaque game over oblige à tout recommencer depuis le début. Below oscille entre beauté et frustration. Une pincée d’accessibilité aurait sorti Capybara Games de l’ombre. Pour vivre heureux…

Below

Édité et développé par Capybara Games, âge: 12+, disponible sur PC et Xbox One.

7

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