JAN OLE GERSTERET NOAH BAUMBACH SIGNENT DEUX FASCINANTES ERRANCES URBAINES, REVISITANT BERLIN ET NEW YORK SUR UN AIR DE NOUVELLE VAGUE.

Oh Boy

DE JAN OLE GERSTER. AVEC TOM SCHILLING, FRIEDERIKE KEMPTER, MARC HOSEMANN. 1 H 22. DIST: TWIN PICS.

Frances Ha

DE NOAH BAUMBACH. AVEC GRETA GERWIG, MICKEY SUMNER, ADAM DRIVER. 1 H 26. DIST: A FILM.

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Sortis sur les écrans à quelques semaines de distance, c’est comme si Oh Boy, de Jan Ole Gerster, et Frances Ha, de Noah Baumbach, avaient voulu entamer une étonnante correspondance, conviant, en toute légèreté, leurs protagonistes respectifs à quelque errance urbaine en noir et blanc. Celle de Niko (Tom Schilling), le « héros » de Oh Boy, se déploie sur des airs jazzy dans un Berlin que la caméra fixe avec amour, tandis que le jeune homme semble devoir, en l’espace de 24 heures, solder les comptes d’une tendance irrépressible à l’irrésolution. Et sa journée d’additionner petites et grandes contrariétés, qui s’ouvre sur une rupture en mode dérobade avec sa copine, avant de le voir se colleter avec un psy peu amène. Et l’on en passe, dont la moindre n’est certes pas l’impossibilité de se procurer une tasse de café, situation absurde en appelant bientôt d’autres.

S’il assume un héritage multiple, allant de la Nouvelle Vague au cinéma de Woody Allen et autre Jim Jarmusch, le premier long métrage de Jan Ole Gerster trouve pourtant des accents singuliers. Soit ceux d’un road-movie pédestre carburant au spleen et à l’humour décalé pour livrer tout à la fois le portrait original d’un rêveur à la croisée des chemins, et celui d’une ville, envoûtante comme rarement.

Allant irrésistible

Les influences sont sensiblement les mêmes (et pareillement assumées et transcendées) pour Noah Baumbach, dont le Frances Ha cite la Nouvelle Vague (par Georges Delerue interposé notamment), mais encore le Mauvais sang de Carax, tandis que le Manhattan cher à Woody Allen lui offre son cadre. C’est là que l’on découvre Frances (Greta Gerwig), lévitant à la surface de la vie jusqu’à en perdre le fil. Soit une éternelle adulescente semblant évoluer dans un entre-deux permanent (elle vit à New York mais n’a plus d’appartement), comme suspendue à des rêves ayant la fâcheuse tendance à se confondre avec des chimères -ainsi de sa carrière de danseuse bloquée à la case apprentie. Et une situation qui pourrait vite tourner à l’aigre, si elle n’affrontait la vie et ses atermoiements avec un coeur énorme…

Co-scénariste du film, Greta Gerwig est tout simplement épatante sous les traits de cette jeune femme ayant la maladresse collée aux baskets, mais mue par un entrain désarmant. Orchestré par Noah Baumbach en un mouvement aérien, son enthousiasme se révèle hautement communicatif, faisant vibrer le spectateur à l’unisson de ses aspirations, en quelque ballet incertain mais porté par la grâce. Irrésistible.

JEAN-FRANÇOIS PLUIJGERS

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