Déesse

Quand Les Requins Marteaux ont lancé leur collection BDcul, le but était de proposer une bande dessinée porno réalisée par des auteurs underground dont ce n’était pas spécialement le créneau. Parallèlement, en hommage aux romans de gare Elvifrance des années 70 et 80, l’humour devait y être grivois et bas de plafond. Pour ce dernier point, la mission est accomplie: pages de garde, fausses pub, fausses citations, gags d’une page… Autant de prétextes aux plus improbables jeux de mots au sens plus qu’appuyé. Avec la vague #MeToo, le renouveau du féminisme et son traitement dans la BD, la question de savoir comment faire de la pornographie « éthique » revient au centre du débat. Si chaque parution de la collection a répondu au moins à un élément du cahier des charges, Déesse d’Aude Picault répond à tous! L’autrice y raconte l’histoire de Lilith, première femme d’Adam issue de la même argile et revendiquant son égalité. La sensuelle rebelle est alors abordée par trois anges envoyés par le Tout-Puissant lui demandant de se soumettre à son mari. Elle refuse et se voit bannie du jardin d’Éden. Elle séduit alors Samaël, l’un des anges qui deviendra par la suite Satan; à deux, ils éprouveront l’Humanité, Lilith accueillant les âmes damnées. Pendant ce temps, Dieu offre à Adam une nouvelle femme, issue cette fois de sa côte, que l’autrice présente comme naïve mais pas dénuée d’esprit. Avant de perdre leur innocence, les deux nouveaux amants auront tout loisir de bien s’amuser. L’érotisme se dégage du dessin très sensuel d’Aude Picault. Elle utilise à la perfection les codes de la BD pour traduire avec justesse les émotions avec un minimum de moyens. De manière subtile et humoristique, l’autrice aborde la place de la femme dans notre société. Bref, une réussite pour ce 20e numéro, déjà, de la collection.

Déesse

D’Aude Picault, éditions Les Requins Marteaux, 148 pages.

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