Il ne faut même pas avoir l’esprit mal tourné pour constater que les artistes ne pensent qu’à ça en ce moment. Est-ce la perspective de la fin du monde qui fait grimper le thermomètre libidinal, comme pour anesthésier l’angoisse par le plaisir? Ça parle cul ou ça le pratique à tous les étages de la maison culture. Shame (Steve McQueen), A dangerous method (Cronenberg), Sleeping beauty (Janet Leigh) ou encore Il n’y a pas de rapport sexuel (de Raphaël Sidoni, portrait au creux des reins du hardeur HPG) pour le cinéma, Octopus (Decouflé) ou As Bacantes (José Celso Martinez Correa) pour les planches, Les merveilles (Claire Castillon), Un homme de tempérament (David Lodge) ou L’éclaircie (Philippe Sollers) pour la littérature, Borgia, Game of thrones ou Spartacus pour les séries télé… Soft, hard, silencieux, bavard, cool, brutal, politique, cérébral, et même endormi, le sexe se décline sur tous les modes. Si l’amateur d’images coquines sera comblé par ce festival de fesses, on reste très loin du marigot pornographique dans lequel baigne la Toile. Tantôt ins-trument de pouvoir, tantôt béquille sentimentale, la Chose sert aussi de baromètre des rapports sociaux. Car l’air de rien, c’est sous la ceinture qu’on mesure le degré de permissivité et l’état de santé mental d’une société. Verdict: une météo des corps instable. Temps triste et maussade pour toute la semaine… Au-delà de la radiographie, cette mise à nu charrie son lot de télescopages stimulants. Ainsi, pour peu qu’on enchaîne le Cronenberg et le Steve McQueen, on a l’impression de passer de la théorie à la pratique, de la salle de cours au labo de bio, ou encore du divan à la chambre à coucher. Un sentiment renforcé par la présence de Michael Fassbender dans ces 2 films que tout sépare en apparence, la mise en scène, la direction d’acteurs, l’atmosphère, mais qui dialoguent par infrarouge sur le désir (ou son absence), sur le sens de l’étreinte, ses pièges, ses faux-semblants. Pour Freud, le sexe c’est la guerre, une lutte fratricide entre les pulsions, cannibales et insatiables, et le Surmoi, gardien de la moralité. Quand la libido gagne la bataille, on voit ce que ça donne avec Brandon dans Shame: un hyper consommateur, accroché à son membre comme le loup de Tex Avery à la dernière branche d’un arbre suspendu au-dessus du vide. Il fornique pour s’oublier, pour combler le vide de son existence. Il a l’air solide, mais son armure de prédateur est fragile. Il suffit qu’une dose de sentiment et d’émotion s’infiltre dans son esprit et c’est la panne assurée… Ailleurs, dans l’arène des séries aux accents historiques en particulier, le sexe lubrifie les luttes de pouvoir. C’est l’auxiliaire du glaive. On sait depuis la nuit des temps que la politique se fait et se défait entre les draps. Ou en tout cas jamais très loin de l’alcôve. DSK en a été la dernière démonstration. En résumé, le sexe s’invite dans les (d)ébats culturels. Ça ne fait que 2000 ans que ça dure…

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PAR LAURENT RAPHAËL

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