Critique théâtre : De Tel Aviv à Jénine

© Hubert Amiel
Estelle Spoto
Estelle Spoto Journaliste

Autour de deux explosions, une dans chaque camp, la vie d’Amine bascule. L’Attentat offre un regard de l’intérieur, profondément humaniste, sur le conflit israélo-palestinien. Une adaptation réussie du roman de Yasmina Khadra, superposant jeu théâtral et musique live.

Un homme qui retrace son parcours chahuté entouré de musiciens jouant en live. De la vidéo tournée sur place et qui nous emmène dans un pays lointain. Ceux qui ont vu Going Home reconnaîtront la patte du jeune metteur en scène Vincent Hennebicq dans cet Attentat adapté du roman de l’écrivain algérien Yasmina Khadra. Mais là où Going Home voyageait jusqu’en Ethiopie, c’est en Israël et dans les territoires occupés palestiniens que ce nouveau spectacle, créé à Mons au Festival au Carré, nous emmène. Et là où le Rwandais Dorcy Rugamba portait les pérégrinations de Michalak de Salzbourg à Addis-Abeba, c’est Atta Nasser, comédien d’origine palestinienne, qui endosse le rôle d’Amine, chirurgien d’origine arabe vivant à Tel Aviv et dont le destin est bouleversé le jour où une bombe explose dans un fast-food de la ville, remettant en question sa relation avec sa femme Sihem et son propre engagement.

Chef d’orchestre d’un quintette -Laurent Blondiau à la trompette, Célestin Massot aux percussions, Marine Horbaczewski au violoncelle, Fabian Fiorini au piano, ce dernier assurant aussi les compositions, et l’impressionnante soprano Julie Calbete-, Atta Nasser raconte en arabe (surtitré en fond de scène) le chemin qu’il suivra vers la Cisjordanie quand ses certitudes se seront effondrées. Moment clé doublé d’un effondrement scénographique saisissant et poétique. Le ventre qui pouvait donner la vie a semé la mort car « aucun enfant n’est tout à fait à l’abri s’il n’a pas de patrie ». Le parcours d’Amine est enrichi de témoignages récoltés en Israël, pondérant quelque peu le point de vue très pro-palestinien de l’ensemble, mais aussi de sublimes poèmes de Mahmoud Darwich et d’images gorgées de lumière, dont un plan fixe sur la mer où le soleil se couche, cette mer que le cousin Adel finira par voir, grâce à son obstination.

Au-delà du contexte politique toujours brûlant, L’Attentat pose des questions universelles sur l’identité et le sentiment d’appartenance, sur la justification de la violence et la nécessité de résistance. Fort, fort, fort.

L’Attentat : Jusqu’au 6 juillet au Théâtre Le Manège à Mons, dans le cadre du Festival au Carré, www.surmars.be, du 3 au 17 octobre au Théâtre National à Bruxelles, www.theatrenational.be., les 6 et 7 novembre à la Maison de la Culture de Tournai, www.maisonculturetournai.com

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