Critique | Musique

[l’album de la semaine] Lana Del Rey – Blue Banisters

© GETTY IMAGES
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

De « star artificielle » à songwriteuse la plus respectée de sa génération, Lana Del Rey continue de nuancer et de surprendre avec son deuxième album 2021.

Dix ans après le tube viral Video Games, le parcours de Lana Del Rey reste l’un des plus intéressants à suivre. Et pour cause! Alors que les quelque (rares) propositions rock mainstream ont fini par diluer leur musique dans la pop YouTube, Lana Del Rey semble, elle, avoir fait le trajet inverse. Rappelez-vous: sur ses premiers albums, l’Américaine « actualisait » son glamour vintage en glissant des remixes ou en ramenant des rappeurs (A$AP Rocky) dans son univers L.A. noir. Aujourd’hui, elle se permet des disques d’americana de plus en plus épurés, réussissant à produire des hits underground avec des ballades de près de 10 minutes (Venice Bitch, en 2019), s’offrant même le luxe de sortir un album de spoken word (Violet Bent Backwards over the Grass en 2020). Résultat: raillée à ses débuts pour la prétendue artificialité de sa démarche, Lana Del Rey est devenue l’une des artistes les plus « crédibles » du circuit, louée par des icônes aussi respectées que Bruce Springsteen. Parlez d’un retournement de situation… Avec son nouveau Blue Banisters, son deuxième album de l’année, la chanteuse-autrice-compositrice prolonge cet état de grâce, gonflant une discographie de plus en plus fascinante. Six mois après Chemtrails over the Country Club, homogène au point de paraître parfois monochrome, Blue Banisters apparaît plus décousu. C’est dû en partie à sa confection: enregistré pendant la pandémie, il repêche notamment des morceaux en chantier depuis quelques années -les premières traces de Nectar of the Gods datent de 2013. Il se permet aussi des bizarreries comme l’interlude The Trio, samplant Ennio Morricone sur un beat trap. À vrai dire, cette légèreté fait du bien. Comme sur le titre Dealer, en duo avec Miles Kane, petite merveille de crooning instantané, alternant chant lascif et coups de sang. Souvent présentée comme l’antithèse indolente des grands effets vocaux d’une Adele (dont la carrière a explosé au même moment), Lana Del Rey montre que sa palette ne se résume pas à surjouer les femmes fatales boudeuses.

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De fait, la chanteuse a souvent été ramenée à la figure de bad girl torturée, chantre de l’ennui et de la lose amoureuse. Une image qu’elle a contribué à entretenir, mais qu’elle corrige de plus en plus. Notamment en jouant sur le second degré, qui était parfois noyé dans ses plaintes sentimentales. À la manière d’un Kanye West fanfaron, elle ironise par exemple sur Beautiful: « What if someone had asked Picasso not to be sad? » S’éloignant du glamour hollywoodien, Del Rey est également de plus en plus « ancrée », à la fois musicalement -les grands espaces ont remplacé les errances urbaines-, mais aussi dans ses textes. « There we were, screaming, ‘Black Lives Matter’« , rapporte-t-elle par exemple sur Text Book, tandis que sur Black Bathing Suit, elle résume la période de confinement en quelques mots: « Grenadine quarantine, I like you a lot/It’s LA, « Hey » on Zoom, Target parking lot« . Dix ans après son premier coup d’éclat, Lana Del Rey continue ainsi de nuancer son propos. Moins spectaculaire peut-être, mais toujours surprenante.

Lana Del Rey, « Blue Banisters », distribué par Universal. ****

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