City lights

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Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Kevin Morby rend hommage à la ville, à Lou Reed, aux Ramones et aux Germs sur un quatrième album épatant qui prend ses distances avec le folk mais pas trop.

Kevin Morby

« City Music »

Distribué par Dead Oceans/Konkurrent.

9

« Joey, Johnny, DeeDee, Tommy« . « Joey, Johnny, DeeDee, Tommy« … Ce n’est pas spécialement sur lui qu’on comptait pour rendre hommage aux Ramones et terminer un morceau en répétant à tue-tête les prénoms des quatre plus célèbres punks en perfecto de l’histoire. Pourtant ce « 1234 » (prononcez « one, two, three, four » of course) est bien l’oeuvre du lutin à la chevelure d’ange Kevin Morby. Lorsqu’il quittait New York à l’automne 2014 pour s’installer dans une maison de Mont Washington, menant une vie d’ermite, paisible et solitaire, le singer songwriter écrivait assez de chansons pour deux disques. Le formidable et tout en finesse Singing Saw sorti l’an dernier et cet impeccable City Music, donc, aujourd’hui livré par le label Dead Oceans. Sur le premier, litteul Kevin se la jouait Bob Dylan/Joni Mitchell. On croise plutôt en se promenant sur les douze plages du second le fantôme de Lou Reed, l’ombre de Patti Smith, l’écoute bien digérée de Television et des Modern Lovers. « C’est une mixtape. Un rêve fiévreux. Une lettre d’amour adressée à ces villes dont je n’arrive pas à me libérer, à ces villes qui sont en moi », résume l’ancien bassiste de Woods qu’on prend un incommensurable plaisir à suivre dans ses déambulations urbaines et noctambules.

Enregistré aux Panoramic Studios avec Meg Duffy (Hand Habits) à la guitare et son vieil acolyte Justin Sullivan (il faisait déjà partie des Babies) à la batterie, puis terminé dans l’Oregon par Richard Swift, City Music conforte Kevin Morby sur son trône. Et on ne voit définitivement personne (à part peut-être dans un autre genre son pote Tim « White Fence » Presley) pour venir l’en renverser. Il y en a eu, des incroyables disques de singer songwriter ces dix dernières années (The Wild Hunt du Tallest Man On Earth, le Benji de Sun Kil Moon, le For Emma, Forever Ago de Bon Iver…). Mais aucun de ces folk rockers n’a réussi le Grand Chelem. Enchaîné quatre pépites comme vient de le faire le natif de Lubbock, Texas, avec Harlem River (2013), Still Life (2014), Singing Saw (2016) et donc maintenant cet impeccable City Music.

City Music est probablement le disque le plus diversifié du bientôt trentenaire. Mini-tube punk bubblegum genre « les Strokes rencontrent Plastic Bertrand » (1234), ballade dépouillée à faire chavirer les coeurs (Dry Your Eyes), divagation folk à la Ryley Walker/Steve Gunn (City Music), reprise sereine du Caught in My Eye des Germs, ce fameux groupe punk et nihiliste de Los Angeles… Kevin Robert Morby réussit tout ce qu’il entreprend avec une insolente décontraction. Il raconte la solitude dans une grande ville, assommé par la pression sociale qui nous oblige à être comme tout le monde (Cry Baby). Semble faire un clin d’oeil au Velvet (Tin Can) et au Dirty Boulevard de Lou Reed (Pearly Gates). Brillant.

Le 9/7 au Cactus (Bruges) et le 15/7 à Dour.

Julien Broquet

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