LA CITÉ DE LA MUSIQUE CÉLÈBRE UN SIÈCLE DE MARIAGE ENTRE MUSIQUE ET CINÉMA, UN PARCOURS PARTICULIÈREMENT INSPIRÉ À L’APPUI…

C’est l’histoire d’un mariage d’amour, autant que de raison: entre musique et cinéma, le lien est aussi complexe qu’apparemment inextricable, qui brasse des concepts multiples. Et qui veut également que « si le cinéma s’est « servi » de la musique, il le lui a bien rendu », suivant l’expression de Laurent Bayle et Eric de Visscher dans l’avant-propos au catalogue de la remarquable expo Musique et cinéma qu’accueille la Cité de la musique, à Paris. Commissaire de celle-ci, N.T. Binh (collaborateur à la revue Positif) en a orchestré le parcours non pas suivant la seule chronologie, ni en tentant une impossible exhaustivité, mais en privilégiant l’angle de l’apport de la musique aux différents stades de la fabrication d’un film, en amont, pendant et après le tournage. La relation souvent mystérieuse qui s’établit entre un réalisateur et un compositeur, ou entre un film et une partition s’en trouve éclairée au gré d’une scénographie inspirée, qui convoque par ailleurs largement l’inconscient du spectateur -et ce, dès le sas d’accueil, où résonne la musique écrite par Georges Delerue pour LeMépris de Godard.

Une magie toujours renouvelée

Ainsi mis dans les dispositions idoines, le visiteur n’a plus qu’à se laisser porter par le cours d’une exposition dont le découpage est à la fois pertinent et limpide. Le volet « Avant le tournage », par exemple, est articulé en plusieurs modules, comme autant de variations qui balaient un champ créatif pluriel, selon que la musique ait simplement été l’inspiratrice du film (postulat valable de Fantasia à The Yellow Submarine), ou qu’elle ait dicté sa loi, impérieuse. Ainsi des Parapluies de Cherbourg, le film en chanté de Jacques Demy, où la mise en scène dut épouser le minutage de la partition préenregistrée de Michel Legrand, appelant ce commentaire de Catherine Deneuve: « Ce qui est étonnant, c’est la magie avec laquelle tout cela s’est fait. » Une magie que l’on retrouve dans la suite de l’exposition, courant du tournage à la postproduction, moment où le mariage entre Quatrième et Septième arts est généralement consommé. Une histoire du cinéma s’y (re)compose, du muet (avec la présence de musiciens sur le plateau pour mettre les acteurs dans l’ambiance) aux documentaires rock, de Hollywood à l’école française, le parcours évoquant encore, chemin faisant, aussi bien les tandems de légende que les cinéastes compositeurs, et l’on en passe, dans un mouvement allant de l’anecdotique à la mise en perspective plus vaste.

Au-delà de la somme de documents et extraits réunis, mais aussi de sa juste mesure didactique, l’intérêt de l’expo réside dans sa qualité immersive. L’interactivité est bien souvent remarquable, qui permet, par exemple, d’écouter Sergio Leone et Ennio Morricone évoquer leur travail, ou encore de superposer la bande-son de Torn Curtain et la partition qu’avait écrite Bernard Herrmann avant qu’Hitchcock ne mette un terme abrupt à leur collaboration, parmi d’autres. Voire, encore, de vibrer au son du Modern Love de Bowie dans Mauvais sang de Carax, ou même de s’improviser mixeur dans une cabine ad hoc sur des extraits de Sur mes lèvres ou Gainsbourg. Au passage, le visiteur est encore invité à se (re)familiariser avec les oeuvres les plus fameuses des Max Steiner, Henry Mancini, Michel Legrand et autres. Et puisque, comme le rappelle Binh, filant un peu plus la métaphore du couple, « c’est bien la façon dont elle se marie avec l’image qui signe la réussite d’une musique de film, et qui contribue à la pérennité du film lui-même », la visite se termine fort logiquement dans une salle de projection où l’on n’a plus qu’à se laisser happer par le ballet qu’elles composent de concert, de Brève rencontre en Vertigo…

MUSIQUE ET CINÉMA: LE MARIAGE DU SIÈCLE? CITÉ DE LA MUSIQUE, PARIS, JUSQU’AU 18 AOÛT. WWW.CITEDELAMUSIQUE.FR

VISITE GUIDÉE JEAN-FRANÇOIS PLUIJGERS, À PARIS

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