Charles Fréger

En 2001, Charles Fréger sillonne le Nord-Pas-de-Calais. Fétichiste des groupes et des uniformes (on lui doit notamment des séries sur les jockeys, les sumos ou les… Bretonnes), le photographe français entend y approcher une nouvelle corporation: celle des majorettes. Son protocole est simple: au fil des clubs visités, faire poser les filles habillées comme pour la parade, seules ou en petites grappes, dans des salles de sport anonymes. L’effet est immédiat: comme prélevées sur le bruit, le mouvement et la fête, leurs mises n’en apparaissent que plus étranges. Velours et motifs flashy des tuniques, coiffes à plumes, hautes bottes à lacets sur bas résilles, visages pailletés: dans le milieu stéréotypé des cheerleaders, l’affichage des corps est aussi celui de leur hypersexualisation. La série est ainsi particulièrement saisissante quand elle s’attarde sur les (pré-)adolescentes. Debout face à l’objectif dans de bien nommés justaucorps, elles sont des défilantes immobiles et sans fanfare: à tout jamais figées dans un adieu à l’enfance. Longues jambes encombrantes, regards frondeurs ou bien un peu vides, peaux ingrates, bras ballants, mains mal à l’aise: chaque fois pareilles et chaque fois différentes, les silhouettes exposent sans cachettes possibles un moment de bascule. Et Fréger ce que le costume montre et cache de ces corps en transit, entre embarras et fierté.

Chaque semaine, hommage à un photographe qui a su capter l’essence inflammable de la jeunesse.

Y.P.

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