Michel Verlinden
Michel Verlinden Journaliste

VÉRITABLE ORFÈVRE DU REBUT, LE FRANÇAIS OLIVIER CATTÉ POSE SES BALISES EN CARTON À LA GALERIE LAZAREW. AU PROGRAMME, LA VILLE ET BIEN PLUS.

OEuvres récentes

OLIVIER CATTÉ, GALERIE LAZAREW, 112, AVENUE LOUIS LEPOUTRE, À 1050 BRUXELLES. JUSQU’AU 18/07.

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En exergue de Cartons, catalogue édité par la galerie Lazarew et consacré au travail d’Olivier Catté (1958), Mathias Leboeuf cite J.M.G. Le Clézio. « En créant les villes, en inventant le béton, le goudron et le verre, les hommes ont inventé une nouvelle jungle dont ils ne sont pas encore les habitants. Peut-être qu’ils mourront avant de l’avoir reconnue. » On ne saurait mieux dire. L’urbanité est notre devenir commun à l’heure où 80 % des individus s’agglutinent dans les villes tentaculaires. Pas étonnant donc que cette hydre soit une obsession pour les artistes. Bien sûr, il y a ceux qui cultivent une approche pariétale, transformant les murs en cavernes. Il en existe beaucoup d’autres qui exorcisent cette emprise d’une manière toute différente, tentant de se saisir de cette matière inépuisable pour lui donner un sens. Ainsi d’Olivier Catté. Sorti des Beaux-arts il y a une trentaine d’années, celui qui se définit comme peintre s’est d’abord intéressé à la notion de labyrinthe, voie d’accès royale à l’enchevêtrement de rues et d’immeubles que constitue tout périmètre urbain. Vivre à New York, ville parmi les villes, a focalisé son attention sur un matériau ambivalent qui lui a permis d’exprimer la cité au plus proche de son essence: le carton. Côté face, celui-ci est le symbole même de la société de consommation. Il est le déchet surnuméraire du consumérisme ambiant. Côté pile, il peut s’avérer précieux, maison de ceux qui n’en ont plus. A lui seul, le carton incarne la chute et le repentir, le gâchis et le recyclage. Catté est sans doute l’artiste qui a le mieux pris la mesure de son potentiel. Il est ce que Jacques Villeglé est à l’affiche.

Architecte du creux

Dès l’entrée, l’exposition des oeuvres récentes d’Olivier Catté, comprendre de 2013 à 2015, attrape le visiteur par le collet. Le travail est d’une haute intensité et d’une grande cohérence. Au centre de la dizaine de « toiles » accrochées, une même obsession déclinée à des niveaux différents. Catté part du matériau brut, le carton tel qu’il est, traversé de caractères variés, d’agrafes, et plus ou moins fiable selon qu’il est gorgé ou pas d’humidité. S’il ajoute quelques aplats de couleur, un noir digne de Soulages, c’est surtout à même le sol et au cutter qu’il travaille. Il creuse, grave et lacère jusqu’à la trame, révélant au choix volume ou profondeur, parfois les deux. Le curseur de son oeuvre évolue entre figuratif différemment anglé -la vue de haut, la vue de face, la perspective axonométrique- et abstraction subtile -mise à jour de rythmes urbains, d’une mécanique organique qui nous dépasse, de rouages inconnus à nous-mêmes. Le résultat est vraiment remarquable en ce qu’il offre un travail d’une grande lisibilité sans toutefois sombrer dans le cliché. On notera que trois séries se croisent au sein de l’accrochage. New York Cartons restitue la sidération pour la mégalopole étatsunienne. Interfaces offre une cure d’altitude optique au travers de paysages abstraits. Cityscapes simplifie l’environnement urbain comme pour nous en montrer la logique.

WWW.GALERIE-LAZAREW.FR

MICHEL VERLINDEN

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