Brûlées

« Tant de courses, de cris, de vols, de meurtres, alors que la seule chose que tout le monde veut, c’est trouver un endroit chaud où mourir. L’essentiel. La substance du bonheur. » En huit chapitres oppressants, merveilleux dans la langue qui les anime, la Catalane Ariadna Castellarnau dépeint huit visions ras-du-sol d’un monde en poussières et ruines, où quelques poignées d’humains hagards tentent de gratter un rab de bouffe, d’éviter les pillards, de déterminer si un être congelé à terre est raide ou respire encore. Les liens, familiaux, amoureux, sociaux s’y sont évaporés, pour bouleverser les quelques êtres encore vaguement sur pieds -les moins braves, ou plus illuminés, ceux qui n’ont pas comme les autres décidé déjà d’abandonner leur dépouille aux circonstances, aux barbares ou aux flammes. Rien n’est clairement explicité, le lecteur se trouve plongé dès la première page dans un univers rigoureusement dévasté, où les cendres polluent l’air au point « qu’il est difficile de déterminer si c’est l’aube ou le crépuscule », et où la meilleure chose à faire consiste à se jeter sur un bûcher pour, comme cette femme, brûler « sans s’arrêter (…) avec un lave-vaisselle et une mobylette ». Se fondre en brasier avec l’équipement commun, disparaître sans se retourner, abandonner tout rêve d’humanité. Fantastique cauchemar.

D’Ariadna Castellarnau, Éditions de l’Ogre, traduit de l’espagnol par Guillaume Contré, 176 pages.

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