De Jane Campion. Avec Abbie Cornish, Ben Whishaw, Kerry Fox. 1 h 59. Sortie: 27/01.

Si l’on excepte sa participation au film collectif Chacun son cinéma, en 2007, voilà 7 ans déjà que l’on était sans nouvelles de Jane Campion, dont le In the Cut trahissait à l’époque des signes évidents d’essoufflement. Renouant, à la faveur de Bright Star, avec un XIXe siècle qui lui avait admirablement réussi dans The Piano, la cinéaste y a aussi retrouvé l’inspiration, cela à la lumière bienveillante des poèmes de John Keats, et de la relation passionnée qui devait unir ce dernier à une jeune femme d’une belle indépendance d’esprit, Fanny Brawne. Entre le poète et sa voisine, les choses ne s’engagent pourtant pas au mieux, alors qu’on les découvre, vivant dans les campagnes londoniennes, peu avant 1820. Tout au plus si on peut, à propos du poète désargenté et d’une Fanny dont l’élégance a les apparences de la frivolité, parler de curiosité réciproque. Insensiblement, pourtant, leur relation évolue. Jusqu’à ce que, transcendée aussi par le pouvoir des mots, la passion s’insinue entre eux, au point de les voir bientôt se consumer. Et faire front face aux obstacles qui s’accumulent, aux conventions en cours venant s’ajouter la maladie qui frappe le jeune homme.

Tendu vers l’amour absolu

Filmant cette passion avec une rare élégance, Jane Campion en restitue l’intensité comme la pure beauté, sublimant à l’écran les sentiments de ses 2 protagonistes. Exaltant l’amour romantique, la cinéaste s’affranchit magistralement du cadre étroit de l’époque pour gagner quelque céleste horizon, et livrer un film tout simplement éblouissant. Elle s’y acquitte avec une discrète mais souveraine maestria, de l’exercice périlleux qui consiste à traduire la poésie à l’écran, recréant la musique des vers de Keats, dont sa caméra capture le moindre frémissement. Et de signer, ce faisant, un envoûtant poème visuel, un film d’une rare fluidité dont chaque plan s’inscrit dans un ensemble vibrant au diapason des sentiments les plus forts, en un élan tendu vers l’amour absolu, non sans trouver encore les accents d’une délicate sensualité. Voilà une £uvre au classicisme éprouvé sans pour autant être jamais guettée par l’académisme; un film que l’on pourrait croire sorti d’un autre temps mais qui n’en apparaît pas moins d’une troublante modernité; un émouvant portrait de femme qui ouvre sur un portrait de l’amour alliant douceur et incandescence. Traversé par un romantisme exacerbé, Bright Star touche aux sens et au c£ur – on s’y abandonne avec félicité.

J.F. PL

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