Les Saintes écritures – Hymne à la découverte et à la transmission, Brendan et le secret de Kells conjugue animation de qualité, imagination créatrice et humanisme fervent.

De Tomm Moore. Musique: Bruno Coulais. 1 h 15. Sortie: 11/02.

Nous voici donc au IXe siècle, en Irlande. Dans l’Abbaye fortifiée de Kells, les moines négligent leur précieux travail d’enlumineurs pour consacrer leurs efforts au plan du frère supérieur: bâtir une haute et puissante enceinte, afin de se protéger des Vikings dont les raids ravageurs se multiplient. Le jeune Brendan, moinillon d’une douzaine d’années, aide comme les autres à la construction. Mais ce qui le fait rêver, c’est l’enluminure, ce travail attentif et dévoué d’illustration des livres dans lequel il entend un jour exceller. L’arrivée du frère Aidan, artiste fameux et détenteur d’un livre aussi fabuleux qu’inachevé, va transformer l’existence du jeune garçon, dont le talent remarqué par le nouveau venu se révélera prodigieux…

Brendan et le secret de Kells s’inspire directement de l’£uvre des grands enlumineurs du Moyen Age pour nous offrir une tranche d’animation de la meilleure eau. Le beau projet du jeune réalisateur irlandais Tomm Moore s’inscrit dans un mouvement vers une animation exigeante, formellement ambitieuse, fondée thématiquement tout en restant très ouverte à un vaste public dont les enfants ne sont assurément pas exclus. Il y aura même, pour les jeunes spectateurs du film, un supplément éducatif à la vision d’une £uvre qui célèbre l’écrit et l’expression artistique comme outils de résistance à la barbarie et à l’intolérance. A notre époque, où l’ignorance croissante, l’absence de transmission culturelle, favorise (c’est statistiquement prouvé) de plus en plus tôt le passage à la violence d’adolescents et préadolescents, le message développé par Brendan et le secret de Kells vient à point nommé.

le pouvoir de la curiosité

Par-delà les aspects religieux de l’anecdote (le Livre de Kells contient les quatre évangiles du Nouveau Testament), c’est une vision humaniste que propose Tomm Moore. Une vision facilement transposable à certaines préoccupations d’aujourd’hui. Et qui ne se limite pas à rappeler l’importance de l’écrit, puisqu’elle exalte aussi le pouvoir de la curiosité, de l’imagination, au travers des aventures de Brendan hors des murs de l’abbaye, dans une forêt interdite dont les mystères attirent le gamin et où l’attend une merveilleuse rencontre…

Avec son style mêlant heureusement esthétique médiévale et trait réaliste, splendeurs du cadre et personnages croqués avec une approche plutôt brute et spontanée, Brendan et le secret de Kells fait un remarquable spectacle. L’humour, qui fait souvent mouche, n’exclut jamais une féconde réflexion, qui nourrit la pensée bien après le générique final. On ne boudera pas cette nouvelle preuve de la santé retrouvée de l’animation en Europe, et singulièrement chez nous puisque la société belge Vivi Fim est le principal coproducteur du film!

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Louis Danvers