Après Bob Dylan pour Todd Haynes, le jeune comédien britannique campe un John Keats magnétique dans Bright Star.

Aux côtés d’Abbie Cornish, Ben Whishaw est assurément la révélation de Bright Star, le film de Jane Campion où il campe un John Keats dont la fragilité n’entame en rien le feu intérieur. Un rôle étincelant, rendu plus troublant encore par une beauté que le jeune comédien britannique – il aura 30 ans dans quelques mois – a résolument magnétique. De quoi, en tout état de cause, le voir définitivement crever l’écran, sans que cette effervescence semble pour autant en mesure d’altérer sa sérénité. Ainsi, à Cannes, en mai dernier, où il s’accommodait avec calme voire amusement du grand cirque médiatique, comparant son expérience du Festival à des « montagnes russes. »

Au vrai, l’acteur n’est pas tout à fait un inconnu: découvert il y a tout juste 10 ans dans Mauvaise passe de Michel Blanc, Ben Whishaw campe, quelques années plus tard, le Jean-Baptiste Grenouille du Parfum de Tom Tykwer. De quoi asseoir un début de notoriété internationale: « C’est le premier film dans lequel j’ai tourné à avoir été vu par autant de monde. Je ne sais pas quel impact il a pu avoir sur ma carrière, je préfère y repenser comme à une expérience de travail très heureuse », commente-t-il sobrement – il a d’ailleurs, depuis, retrouvé Tykwer pour The International.

A fleur de peau

Dans la foulée de ce dernier, Whishaw s’attelait au rôle de John Keats, se découvrant bientôt des affinités insoupçonnées avec l’auteur de Ode to a Nightingale. « Je ne connaissais à vrai dire pas grand-chose de lui. Bien qu’aimant beaucoup la poésie, j’avais le sentiment que les poètes romantiques ne seraient pas ma tasse de thé. Un préjugé, tout simplement, mais qui n’a pas résisté à mon travail sur le film: je suis devenu amoureux aussi bien de la langue que de Keats, qui était quelqu’un de merveilleux. «  Du poète, l’acteur souligne ainsi la noblesse – « il disait toujours la vérité, c’était quelqu’un d’incroyablement honnête, une qualité que j’admire chez l’être humain » –, à quoi il ajoute un trait qui pourrait surprendre, sa force. « Il avait en lui une sensibilité incroyable, une grande fragilité, mais aussi une immense force. Impossible, sans cela, d’être aussi prolifique. Cette combinaison de sensibilité et de force dans une même personne est magnifique. »

Atteint de tuberculose, Keats connaîtra une mort prématurée – « on peut se demander où l’aurait conduit sa créativité. Songez qu’à 25 ans, un âge où Shakespeare n’avait encore rien écrit de très substantiel, Keats avait déjà composé les poèmes d’un génie… » Un parcours de vie que l’on pourrait rapprocher de celui d’un Rimbaud, auquel Ben Whishaw avait largement (et consciemment) emprunté pour son incarnation de Bob Dylan dans le I’m not There de Todd Haynes. « Keats et Rimbaud ont pour moi en commun d’avoir été tous 2 des rebelles, qui allaient à l’encontre des attentes de leur époque. Mais même s’il s’agit de 2 biopics non conventionnels consacrés à des poètes, j’ai vécu Bright Star et I’m not There de façon fort différente. Et je me sens assurément plus proche de Keats que de Dylan – je ressens une connexion profonde avec lui, quoique cela puisse signifier. »

Rencontre Jean-François Pluijgers, à Cannes

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