Attends-moi au ciel, capitaine

En proie à la panique, pris de tremblements dans la tranchée, Manzana n’est toujours pas parvenu à tirer sa première balle. Dans la jungle, sous une pluie d’obus, le jeune homosexuel colombien se verrait plutôt en train de refaire son vernis à ongles. C’est qu’il y a quatre mois à peine, il faisait la fête à Cali où sa seule préoccupation était de trouver l’argent nécessaire pour se faire poser une paire de seins… Jusqu’à ce que son père le fasse enrôler dans l’armée « pour en faire un homme ». Inès, sa mère adorée, dira qu’il faut le comprendre: « Il est policier, mon fils, mets-toi à sa place. » Mais personne pour se mettre à la sienne, celle du muchacho qui aime les hommes, emporté dans la guérilla, bientôt prisonnier des FARC au fin fond de la forêt tropicale. Durant deux ans de captivité, entre bombardements, violences des militaires et lits d’infirmerie, son plus grand rêve d’évasion revêt les traits de son fougueux capitaine. Entre crises de paludisme et hépatite, les messages de la famille captés à la radio, Jhonny « Catalina » Manzana échappe cinq fois à la mort… Auréolé de plusieurs prix prestigieux, Jorge Enrique Botero puise dans son expérience de journaliste spécialiste des FARC et use du privilège de la crónica pour « ajouter au récit une touche de lumière imaginaire.(…) Dans tous les cas, ce qui est raconté ici a été vu ou entendu, c’est une manière de voir beaucoup plus complète (…) car on peut ajouter une odeur dans l’atmosphère, et même l’air d’une musique lointaine. » Sur un air de bolero transpirant la sueur, l’alcool et la poudre, un texte entêtant, shot de mezcal à s’enfiler d’une traite.

de Jorge Enrique Botero, Éditions Marchialy, traduit de l’espagnol (Colombie) par Elvine Boura-Dumont, 176 pages.

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