Critique | Livres

Le roman de la semaine: Pas Pleurer, prix Goncourt surprise

Ysaline Parisis
Ysaline Parisis Journaliste livres

Prix Goncourt surprise, Pas pleurer revient sur un pan de la Guerre civile espagnole, à travers le récit de Montse, mère vieillissante de Lydie Salvayre, à qui cette dernière fait raconter son été 1936.

Le roman de la semaine: Pas Pleurer, prix Goncourt surprise
© Seuil

Son frère Josep, gagné aux thèses libertaires et prenant bientôt part à l’insurrection de Haute Catalogne, Montse, 15 ans, va s’engouffrer à sa suite, y goûtant là « l’unique aventure de son existence« . A ce récit épique, burlesque et enlevé (entièrement composé dans un français singulier, truffé d’hispanismes -travail stylistique solide, bien qu’un peu poussif parfois), Salvayre accole celui d’un autre témoin: Georges Bernanos. Ecrivain catholique et « témoin déchiré » de la guerre, le romancier exprime en temps réel son dégoût de l’Eglise et de l’Europe catholique dans ce qui deviendra Les Grands Cimetières sous la lune. Oscillant entre un versant heureux -l’expérience soudaine et échevelée de la liberté par une jeune femme-, et un versant noir -la colère de Bernanos devant la montée des fanatismes-, Pas pleurer rend dans ses meilleurs moments cette sensation vibrante de ferveur et d’invincibilité, de grandeur d’une révolution. Multipliant les tons, et mené dans une forme mi-documentaire, mi-romanesque, le livre donne toutefois la sensation d’user de son entrelacement de voix avec didactisme, et de Bernanos comme d’une caution -le lien, théoriquement intéressant, est un peu raide littérairement. Livre politique (dans le sous-texte duquel la critique en France s’est empressée de saluer une dénonciation des nationalismes de brûlante actualité), Pas pleurer confirme aussi un gros penchant de la rentrée littéraire pour le roman historique. Le propos romanesque a beau ne pas nous avoir complètement emporté, à côté du larmoyant Charlotte de David Foenkinos –son concurrent immédiat-, il n’y avait clairement pas photo.

  • DE LYDIE SALVAYRE, ÉDITIONS DU SEUIL, 288 PAGES.

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