Laurent Raphaël
Tenue d’été
L’édito de Laurent Raphaël
Ça y est, c’est l’été! La météo n’est pas encore au courant mais certains signes ne trompent pas: des trous partout dans Bruxelles, des mines blafardes qui rasent les murs, des parents qui s’arrachent les cheveux pour caser les mioches pendant deux mois, des ados qui peaufinent leur plan de bataille pour prendre d’assaut les festivals…
Nos ancêtres les Gaulois devaient déjà ressentir ça à la veille de s’enfiler l’E40 mais chaque année, on a l’impression que le bout du rouleau se rapproche un peu plus. On roule sur la réserve dès le mois de mai à présent. Il faut dire que cette fois-ci, objectivement, les raisons de tirer la langue ne manquent pas. La zone euro qui glisse dans le gouffre par les pieds, la Syrie qui charcute gratis à l’ombre de la Chine et de la Russie, le terrorisme qui contamine jusqu’au voisin de palier, sans parler de l’apocalypse qui nous engloutira tous en décembre. Il y a de quoi faire ravaler sa joie à un Charles Trenet. Même Facebook s’est pris les pieds dans le tapis de la bourse, lézardant le canot de sauvetage numérique, le seul encore entier à bord de l’arche. Quant à l’Euro, celui qu’on a lamentablement loupé, s’il n’est pas menacé d’éclatement -il a traversé la Guerre froide-, il ne parvient que mollement à nous soulager du poids du quotidien.
Non, décidément, le coeur n’y est plus. A peine si la défaite de nos frères ennemis hollandais a réussi à nous arracher un sourire. Le moral dans les talons, on attend donc les vacances comme le navigateur naufragé les secours. Certes, récession oblige, le grand voyage en famille d’un mois au Laos attendra. A la place, ce sera une semaine en appartement à Middelkerke. Avec vue imprenable sur le ciel couleur béton et sur les parapluies. Pas grave, on fera contre mauvaise fortune bon coeur. En appelant à la rescousse les souvenirs délavés de notre propre enfance sur ce sable humide. L’émotion y affleure autant que s’ils étaient brûlés par le soleil. Après tout, ce qui compte, ce n’est pas tellement la couleur des sentiments, c’est leur intensité. Et puis, ne pas trop s’éloigner de notre caillou, c’est l’occasion de mordre à pleines dents les fruits culturels locaux.
Et la corbeille est une fois encore bien garnie, comme vous pourrez le constater dans ce numéro spécial. Toute l’équipe de Focus s’est mobilisée pour vous faire passer un été trépidant. Des grosses cylindrées musicales aux petits bolides de la scène en passant par les limousines cinématographiques, il y en a pour tous les goûts, toutes les audaces, toutes les envies. Quant à nous, pas question de vous abandonner pendant les vacances. Que du contraire. On met les bouchées doubles sur le site pour vous faire vivre les festivals en direct, à commencer par Werchter et Couleur Café. Et on vous retrouve dès la semaine prochaine avec une formule du magazine enrichie en iode. Jugez plutôt: une série sur les salles de concerts mythiques, une autre illustrée par la légende Blexbolex sur les premières phrases de roman commentées par leurs auteurs, une autre encore -toute en images- sur les métamorphoses de New York. Le tout sans perdre de vue l’actualité cinéma, discographique ou littéraire. On monte le son, on baisse la vitre, on respire un grand coup et on se laisse guider…
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