Une Nuit Blanche à Bruxelles

Si l’édition 2010 de la Nuit Blanche avait rassemblé 100.000 personnes, celle-ci, fraîcheur quasi estivale de la nuit aidant, en a rassemblé 20.000 de plus. Terrasses de café et rues bondées, les Bruxellois sont donc encore au rendez-vous. A croire qu’ils se plaisent vraiment à déambuler dans les rues et les places de leur centre-ville, comme pour les redécouvrir, et surtout se les réapproprier. On les comprend.

Quarante-trois créations résolument contemporaines, réflexives et interactives ont animées la ville de Bruxelles, en trente-trois espaces différents, extérieurs et intérieurs, de la rue Antoine Dansaert à la place Saint-Géry. Presque trop pour ne pas frustrer le déambulateur avide et indécis, qui n’a que douze heures pour tout absorber. Bien assez pour satisfaire les goûts forcément éclectiques d’un public large, à la fois familial – surtout au début de la soirée – jeune, et fêtard, belge et international, flâneur et curieux.

Interactivité et multimédia

Au hasard des sons acoustiques ou numérisés, des paroles déclamées, chuchotées, ou même criées, des images projetées, ou mises en espace (parfois en véritable scène); le spectateur noctambule est constamment sollicité: voir, lire, entendre, et même agir – et ainsi prendre part aux créations qui souvent se déroulent en temps réel. La Nuit Blanche bruxelloise, plus que les autres à travers le monde (Brescia en Italie, Oran en Algérie, Toronto au Canada, Kyoto au Japon, Paris en France) entend en effet solliciter ceux et celles qui la fréquentent, presque au même titre que les artistes.

Côté installations visuelles, très nombreuses, allons place Sainte-Catherine par exemple. Cinquante gouttes blanches géantes, suspendues en extérieur, offrent à ceux qui passent leur tête à l’intérieur, le reflet arrondi d’eux-mêmes, en même temps qu’une réflexion sur le soi et l’image qu’on en a. Ou à l’intérieur de l’église du béguinage, autre exemple, des mains parfois encore pleine de la mousse qui inonde la rue du vieux marché aux grains, dessinent au stylet laser, sur une plaquette numérique, des lettres ou des images au trait vert, bleu ou jaune fluorescent. Il s’agit de « light tag », projetés juste en face, en 3D.

Côté performances, même les concerts, les représentations de théâtre, de danse, ou les déclamations de poésie (souvent aux airs de slam) invitent les passants à sortir de leur passivité. Elles brouillent constamment les limites entre public et performers, entre objets et sujets de création entre scènes de la vie et scènes de la rue. Par exemple, au bout de la rue des chartreux, deux âmes en exil vont et viennent, s’évitent et se cherchent, s’aiment et se détestent. Avec des mouvements amples et violents, d’un pas pressé et titubant, elles déambulent au centre de la rue qui est leur scène, et surtout sur le trottoir ou se trouve le public: les deux danseurs et acteurs de la compagnie Giolisu n’hésitent pas à frôler et bousculer les spectateurs, autant physiquement qu’émotionnellement.

Et pour se remettre de ces émotions, alors que le soleil commençait à peine à se lever sur la capitale, la Nuit Blanche a offert aux courageux qui sont allés au bout de la nuit son traditionnel petit-déjeuner, bien mérité.

Lydie Mushamalirwa

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