Critique

The Deep Blue Sea

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DRAME | L’émotion et le style s’épousent idéalement dans un drame amoureux bouleversant, où Rachel Weisz éblouit devant la caméra sensible de Terence Davies.

THE DEEP BLUE SEA, DRAME DE TERENCE DAVIES. AVEC RACHEL WEISZ, TOM HIDDLESTON, SIMON RUSSELL BEALE. 1H38. SORTIE: 20/06. *****

Non nous ne l’avions pas oublié. Mais ils étaient loin déjà, les bonheurs poignants de sa Trilogy (1976-1984), puis les larmes d’émotion versées devant son chef-d’oeuvre de 1988, Distant Voices, Still Lives. Cinéaste trop discret, même s’il dévoile tant de lui-même dans ses films, Terence Davies revient au premier plan avec un portrait de femme des plus intenses et admirables. Adaptant la pièce de Terence Rattigan, le natif de Liverpool alimente sans aucun doute de ses propres souvenirs d’enfant élevé dans l’immédiat après-guerre une histoire située autour du début des fifties. L’héroïne s’appelle Hester Collyer, et est l’épouse d’un magistrat nettement plus âgé qu’elle. Sa rencontre avec un jeune pilote de la Royal Air Force, revenu de la guerre quelque peu perturbé, va déclencher une passion amoureuse aux conséquences tragiques… L’essentiel du film se déroule durant une journée, dans le petit appartement où Hester a décidé de se suicider. La chronique de son amour et de sa chute nous est narrée en flash-back, composant peu à peu, subtilement, une mosaïque humaine aux couleurs de désir, d’espoir, de douleur et de sacrifice.

Davies filme remarquablement les êtres et les lieux, en poète du travelling, du hors-champ, caressant d’une caméra (hyper)sensible une interprète qui lui offre le meilleur d’elle-même. Rachel Weisz est sublime dans le personnage d’Hester. Celle que Bertolucci révéla dans Stealing Beauty et dont The Mummy fit une vedette populaire n’a jamais eu peur du risque, comme l’attestent ses créations dans les controversés The Fountain et Agora. L’actrice se livre sans retenue dans un film dont elle habite chaque scène et qu’elle porte littéralement, avec une émotion palpable et une vérité de chaque instant. Rarement a-t-on vu pareil abandon, marié à pareille concentration. Beau paradoxe d’une prestation bouleversante, dans une oeuvre qui ne l’est pas moins, et qui nous hante bien longtemps après que le merveilleux plan final (rime idéale à un autre, venant au tout début) ait achevé d’une parenthèse enchantée le plus beau film d’amour malheureux de ce début de siècle.

Louis Danvers

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