Critique

The Dark Knight Rises

© Warner Bros Pictures
Jean-François Pluijgers
Jean-François Pluijgers Journaliste cinéma

ACTION | Christopher Nolan réalise un authentique tour de force, de quoi maintenir Batman largement au-dessus de la mêlée des super-héros dont nous inonde désormais le cinéma hollywoodien…

The Dark Knight Rises, film d’action de Christopher Nolan. Avec Christian Bale, Tom Hardy, Anne Hathaway. 2h44. Sortie: 25/07. ****

ACTION | Alfred Hitchcock, qui en connaissait un bout sur la question, avait pour coutume de dire « The better the villain, the better the picture.«  Un précepte parfaitement assimilé par Christopher Nolan qui, avec la complicité de Heath Ledger, donnait au cinéma un méchant d’anthologie en la personne du Joker, ennemi à la (dé)mesure de son Batman dans The Dark Knight . A charge, dès lors, pour le cinéaste britannique de doter celui-là d’un digne successeur dans The Dark Knight Rises. A cet égard, Bane (Tom Hardy), le « bad guy » de ce troisième volet, ne répond que partiellement aux attentes: imposant et machiavélique, certes, mais aussi tellement plus monolithique, derrière son masque féroce, que son prédécesseur -à tel point que la tentation carnavalesque guette le film par endroits.

C’est là, d’ailleurs, la principale réserve que l’on aura à l’égard à ce nouvel épisode des aventures de Batman à la sauce Nolan, réserve vite dissipée toutefois. Mieux même: passée une mise en place quelque peu laborieuse, à l’aune en fait d’enjeux démultipliés, l’ultime contribution du réalisateur de Memento à la mythologie de Batman se révèle d’une redoutable efficacité, combinant intelligence de l’écriture, résonance du propos et virtuosité de la mise en scène.

Catwoman réinventée

Batman/Bruce Wayne (Christian Bale), on le retrouve 8 ans après qu’il s’était volontairement couvert d’infamie, sacrifiant sa réputation à celle du défunt procureur Harvey Dent au nom d’un intérêt supérieur, la tranquillité d’une Gotham City que ce dernier avait nettoyée de ses malfrats à l’aide d’un arsenal de lois répressives. La menace sans précédent que fait planer sur la ville Bane, un terroriste dénué de scrupules et prompt à semer la panique, de Wall Street au stade des Gotham Rogues, va contraindre un Wayne à l’âme torturée à sortir de sa retraite, point de départ d’un mano a mano pour lequel il ne semble guère armé a priori.

Parti sur ces bases, The Dark Knight Rises va se déployer crescendo, le film gagnant en ampleur à mesure que Nolan en emboîte les pièces avec maestria en une progression millimétrée, qui en déplace aussi le centre de gravité d’un protagoniste à l’autre. Joseph Gordon-Levitt et Marion Cotillard s’invitent ainsi avec bonheur dans la jungle de Gotham City, sans même parler de Anne Hathaway qui réinvente magistralement Catwoman, monte-en-l’air aux aptitudes félines doublées d’intentions obscures.

Au-dessus de la mêlée

Bluffant, le scénario imaginé par le réalisateur et son frère Jonathan ne se borne pas à orchestrer un faisceau d’intrigues faisant largement écho, ellipses comprises, aux deux premiers épisodes. Il s’immisce aussi dans les méandres de la psyché américaine post-11 septembre, au son d’une agitation sociale aux échos contemporains. S’y ajoute le plaisir manifeste que prend le cinéaste à jouer d’un mythe qu’il décline tout en noirceur assumée, entre zones d’ombre et autres ambiguïtés, à l’aune de son époque, là encore. Cela, sans faire pour autant l’économie de scènes à couper le souffle, l’assaut aérien initial donnant le la d’un nouvel opus qui est aussi un maître film d’action, emportant le spectateur au gré de sa construction vertigineuse, jusqu’à transcender ses attendus incontournables. Un authentique tour de force, pour un film aux allures de fable sombre pour les temps présents. De quoi, en tout état de cause, maintenir Batman largement au-dessus de la mêlée des super-héros dont nous inonde désormais le cinéma hollywoodien…

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