Critique

[Le film de la semaine] Whitney, une histoire de famille

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Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

DOCUMENTAIRE | Un nouveau docu revient sur la trajectoire dramatique de Whitney Houston. Un itinéraire glaçant où se mêlent célébrité, drogues et secrets de famille.

En 1985, la jeune Whitney Houston effectue son premier passage télé. Sur le plateau du Merv Griffin Late Show, elle épate tout le monde en reprenant Home, tiré de la comédie musicale du Magicien d’Oz. À l’origine, le morceau est chanté par Diana Ross. Mais plus encore, c’est à Michael Jackson que Houston fait penser: une même légende fracassée sur l’autel de l’über-célébrité.

La scène est évidemment reprise par le documentaire que Kevin MacDonald a consacré à la chanteuse. Le réalisateur de The Last King of Scotland (mais également du docu One Day In September, sur la prise d’otage d’athlètes israéliens lors des JO de Munich, en 1972) glisse l’extrait au début et à la fin de sa biographie. Comme pour appuyer un fil narratif qui n’en avait pas vraiment besoin: dans Whitney, le foyer familial est à la fois la rampe de lancement de la chanteuse et un endroit étouffant où il est compliqué d’être tout à fait soi-même; une base solide, mais aussi un lieu toxique, nid de toutes les névroses et de tous les noeuds existentiels.

De l’icône pop lisse et glacée à la diva bouffie par les excès, pour finir noyée dans sa baignoire, dans sa chambre d’hôtel, en 2006, MacDonald déroule ainsi la trajectoire de manière implacable. C’est le plus perturbant: l’impression d’un enchaînement de causes et d’effets qui semblent presque inéluctables. On pense évidemment au documentaire sur la course bien trop courte d’une autre étoile, Amy Winehouse. Sans doute le succès d’ Amy a-t-il dû d’ailleurs encourager les producteurs: en un an, c’est déjà le deuxième film s’attardant sur la vie de Houston. À la différence du travail de Nick Broomfield (Whitney: Can I Be Me, sorti l’an dernier), la bio de MacDonald a été autorisée (a priori) par la famille. Mais dans les deux cas, l’histoire est celle d’une vie ruinée par la célébrité et les secrets du clan Houston.

[Le film de la semaine] Whitney, une histoire de famille

Abus

La déchéance de Whitney n’est pas qu’une descente aux enfers pour presse trash. Comme le montre MacDonald, par de brefs inserts quasi « clippés », c’est aussi le produit d’une starification folle que les années 80, obnubilées par le fric et l’artifice, ont poussée à des degrés alors insensés, et où, comme Jackson, Houston sera « blanchie » pour mieux réussir. Pour autant, c’est encore sur la cellule familiale que se focalise le plus le documentaire, dans lequel interviennent aussi bien la mère (au début, brièvement) de Whitney, que son ex-mari Bobby Brown (peu disert), ses frères (bien plus bavards), assistantes personnelles, etc. De ces interview, MacDonald déterre non seulement la bisexualité de la chanteuse (sa relation supposée avec Robyn Crawford, absente du film), mais aussi une histoire d’abus sexuel subi gamine, de la part de sa tante Dee Dee Warwick, soeur de Dionne. Corroboré par son frère, réfuté entre-temps par sa mère, l’épisode est mentionné en fin de docu, pour expliquer les difficultés de la chanteuse à s’en sortir. À ce moment-là, la voix de Whitney Houston a cependant déjà commencé à s’évanouir et s’évaporer lentement. Inexorablement.

De Kevin MacDonald. 2h. Sortie: 05/09. ***(*)

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