Oeuvre de toute beauté où le récit d’apprentissage se double d’une méditation lumineuse sur le cycle de la vie et de la mort dans la nature souveraine de l’île d’Amami.
Il émane du cinéma de Naomi Kawase un sentiment délicat, voisin de la plénitude. Ainsi, aujourd’hui, de Still the Water, une oeuvre qui, comme la plupart de ses opus précédents, balaye le mystère de l’existence, tout en s’inscrivant dans une perspective cosmique –« Les règles de l’univers transcendent nos solitudes, relève la cinéaste japonaise dans sa note d’intention, où elle raconte avoir entrepris ce film après le décès de sa mère adoptive, qui l’éleva à la place de ses parents biologiques. C’est ainsi que même si ma mère adoptive est morte, le soleil se lève et la lune se montre pleine. C’est cette grandeur, la grandeur de la nature que je souhaite exprimer dans ce film. » Pour ce faire, la réalisatrice a planté sa caméra dans l’île d’Amami, au sud du Japon, un lieu reculé dont les habitants vénèrent la nature comme un dieu, et qui se trouve par ailleurs être la terre de ses ancêtres. C’est là le cadre d’un récit d’apprentissage mettant en scène Kaito, un garçon de seize ans, et Kyoko, son amie; un duo d’adolescents à l’heure du premier amour et qui, confronté à l’énigme d’un corps rejeté par la mer, suivie de l’annonce de la disparition prochaine de la mère de la jeune fille, va voir son horizon insouciant se brouiller insensiblement.
A leur suite, et en écho aux questions que soulève leur conscience nouvelle du monde, Naomi Kawase se livre à une méditation contemplative sensible sur le cycle de la vie et de la mort, la mémoire et la transmission, assortie d’une autre, embrassant le rapport de l’homme à son environnement. Si Still the Water touche autant qu’il ne trouble, c’est parce qu’il n’y a là rien de forcé toutefois, récit du quotidien et perspective spirituelle se confondant dans un tout harmonieux, où domine, in fine, l’impression de souveraine sérénité. Lové dans une nature d’une ravageuse et immuable beauté, ce film, magique, ondoie avec grâce dans la mer de l’existence. C’est là, évoquant le Tabu de Murnau ou le Still Walking de Kore-eda, un pur enchantement, aussi discrètement éblouissant que durablement pénétrant; un chef-d’oeuvre qui, incompréhensiblement oublié du palmarès du dernier festival de Cannes, n’usurperait certes pas le titre de film de l’année.
- DE NAOMI KAWASE. AVEC NIJIRO MURAKAMI, JUN YOSHINAGA, MIYUKI MATSUDA. 1H59. SORTIE: 29/10.
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