Critique

[Le film de la semaine] Kubo et l’armure magique, de Travis Knight

Kubo et l'armure magique (Kubo and the Two Strings), de Travis Knight. © DR
Nicolas Clément
Nicolas Clément Journaliste cinéma

ANIMATION | Une plongée philosophe, quasiment zen, dans un folklore de légendes tendant vers l’harmonie et l’authenticité.

Film-tournant dans l’histoire encore jeune de ce nouveau géant US de l’animation, le quatrième long métrage du studio Laika (Coraline, ParaNorman, The Boxtrolls) se construit fort à propos autour de l’idée de rites de passage: de l’enfance à l’âge adulte, de la vie à la mort, du visible à l’invisible… Garçon vif et généreux partageant son temps entre le chevet d’une mère affaiblie et la place du village littoral environnant, Kubo mène une existence modeste, marquée du sceau de l’absence (il lui manque un oeil, il a perdu son père), dans un Japon médiéval de fantasy. Un quotidien brusquement chamboulé quand il invoque par erreur un démon du passé, le courroux de cet esprit malfaisant le forçant à prendre la route afin de percer le mystère de son héritage flanqué de deux bienveillants compagnons et de son shamisen magique, luth à long manche dont il tire aussi bien le sel de son formidable talent de conteur-né que la source d’un pouvoir grandissant à même de le voir accomplir son héroïque destinée…

A mille lieues du voyage initiatique et intérieur de dépliant touristique qui guettait pourtant, Travis Knight offre avec Kubo et l’armure magique une plongée philosophe, quasiment zen, dans un folklore de légendes tendant vers l’harmonie et l’authenticité. Fort d’une technique virtuose où la stop motion à l’ancienne s’accommode parfaitement d’éléments numériques, et intègre aussi bien l’art délicat de l’origami qu’un monstre entièrement imprimé en 3D, le film se paye le luxe de prendre son temps, de jouer des silences, d’oser la tristesse, la mélancolie, de faire confiance à l’intelligence et à la sensibilité de ses spectateurs, même les plus jeunes. A l’arrivée, la faculté d’envoûtement de l’ensemble, arrosé d’un humour fin, jamais appuyé, tient autant à la nature de son récit mythique qu’à la singularité de son atmosphère et de ses références, d’un goût absolument parfait -impossible de ne pas penser au King Kong du tandem Cooper-Schoedsack (1933) ou à la fameuse scène de la bataille des squelettes animée par Ray Harryhausen dans le cultissime Jason and the Argonauts de Don Chaffey (1963) au détour des aventures les plus corsées traversées par Kubo et les siens. Tandis que la bande son s’amuse en irrésistibles variations orientalisantes sur le While My Guitar Gently Weeps des Beatles, cette odyssée humaniste aux vertus cicatrisantes invite à faire la paix avec soi-même, et à accepter la vie jusque dans ses aspects les plus tragiques. Magique!

DE TRAVIS KNIGHT. AVEC EN V.O. LES VOIX D’ART PARKINSON, CHARLIZE THERON, MATTHEW MCCONAUGHEY. 1H42. SORTIE: 28/09. ****

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