Critique

Le film de la semaine: Incompresa, l’enfance réinventée

Incompresa © Teresa Sdralevich
Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

DRAME | Une gamine délaissée fait les 400 coups dans ce petit bijou de cinéma vivant, vibrant, signé Asia Argento.

On ne choisit pas ses parents. Ceux d’Aria, 9 ans, sont célèbres, admirés du monde. Lui acteur et star de cinéma. Elle musicienne. Il est presque toujours parti, pour quelque tournage. Elle l’est un peu moins souvent, mais concerts et tournées l’emmènent au loin trop fréquemment aux yeux de la fillette. Laquelle voit papa et maman se disputer, se déchirer, se séparer dans la douleur et même parfois dans la violence. Ses demi-soeurs la tenant par ailleurs à l’écart, Aria souffre d’un manque d’amour et d’harmonie que compense un peu, mais insuffisamment, l’amitié qui la lie à sa complice d’école Angelica. Quand un petit chat noir, vite baptisé Dac, entre dans sa vie, Aria trouve un certain réconfort. Mais entre l’enfer familial et une scolarité brillante qui ne l’empêche pas de se sentir exclue, trop différente, pressions et déceptions vont finir par pousser la gamine à une décision majeure…

Si son titre invite d’évidence au rapprochement avec l’Incompreso, chef-d’oeuvre de Luigi Comencini (1966) sur l’enfance malheureuse, si le film en question est par ailleurs directement cité à la fin d’Incompresa, l’oeuvre d’Asia Argento (lire son interview dans le Focus du 03/04) affiche un élan, une émotion, une fantaisie on ne peut plus personnels.

Mémoire vive

Alimenté en partie de souvenirs intimes, liés à sa propre enfance de fille de cinéaste (Dario Argento, grand maître du « giallo ») et de comédienne (Daria Nicolodi), Incompresa nous emmène avec bonheur dans l’univers d’Aria, gosse blessée, révoltée, dont l’audace et le talent vont lui permettre de ré-enchanter une vie délaissée. Aria sera, et elle sera pleinement, même s’il faudra pour ça prendre la rue pour terrain d’aventures, de découvertes, de rencontres avec des marginaux tellement plus généreux, ouverts, à cette différence qui rend la fillette unique mais que ses proches ne peuvent ni ne veulent reconnaître à sa pleine valeur.

L’écriture et la réalisation s’affichent ouvertement sentimentales, poétiques et rugueuses à la fois, offrant au regard une riche texture faite de sensations, d’émotions, d’humour et de profonde mélancolie. Exposant sa fragilité avec une assurance très rock (la bande musicale fait fort, avec notamment des sons signés Brian Molko), Argento signe une oeuvre aussi rythmée, percutante, que tendre et attachante.

Dans le rôle d’Aria, Giulia Salerno est extraordinaire. Une trouvaille de choix pour incarner au mieux une chronique d’enfance superbe et décalée, drôle et poignante, entre innocence trahie et punk attitude.

D’Asia Argento. Avec Giulia Salerno, Charlotte Gainsbourg, Gabriel Garko. 1h46. Sortie: 01/04.

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