Critique

Le film de la semaine: Dheepan, de Jacques Audiard

Antonythasan Jesuthasan dans Dheepan de Jacques Audiard. © DR
Jean-François Pluijgers
Jean-François Pluijgers Journaliste cinéma

DRAME | C’est peu dire qu’en octroyant la Palme d’Or de la dernière levée cannoise à Dheepan, de Jacques Audiard, le jury emmené par les frères Coen a pris bon nombre de festivaliers par surprise.

Si De rouille et d’os, et plus encore Un prophète avant lui, avaient fait peu ou prou l’unanimité sur la Croisette, on n’en dira pas tant de ce film (fort) librement inspiré des Lettres persanes de Montesquieu, le septième long métrage de son auteur. Celui-ci y retrace l’équipée de Dheepan (Jesuthasan Antonythasan), un ancien combattant tamoul entreprenant de fuir la guerre civile au Sri Lanka. Et qui, afin d’obtenir plus facilement l’asile politique en France, va se construire une famille de fortune, embarquant pour un voyage incertain avec Yalini (Kaliseaswari Srinivasan) et Illayaal (Claudine Vinasithamby), une femme et une fillette inconnues. Arrivée à destination, la famille ainsi (re)composée va vivoter dans un premier temps, jusqu’au jour où Dheepan obtient un boulot de gardien dans une cité sensible, zone de non-droit contrôlée par les gangs. Et le trio de réfugiés de débarquer de plain-pied dans un inconnu violent dont ils ne maîtrisent pas les codes; d’une guerre, l’autre, en quelque sorte…

Se soustrayant au carcan du film social, Audiard signe une oeuvre forte et originale, portée par une mise en scène viscérale et millimétrée, cinéma sous haute tension exposant ses protagonistes à la violence du monde. Et réussissant, dans un premier temps, à conjuguer l’intime et l’urgence tandis que drame familial et film de banlieue inédits s’enchevêtrent en un no man’s land affolant. Dommage, toutefois, que Dheepan s’égare sur la distance, dans un troisième acte où, l’homme hanté redevenu guerrier, le film d’action au premier degré s’invite sans plus de nuances dans la partie. Au point de saper l’édifice mis en place avec une exemplaire maîtrise par le réalisateur -un sentiment que n’atténue pas, au contraire, un épilogue caricatural et, partant, éminemment discutable, même si résonnant incontestablement avec une actualité brûlante.

DE JACQUES AUDIARD. AVEC ANTONYTHASAN JESUTHASAN, KALIEASWARI SRINIVASAN, VINCENT ROTTIERS. 1H50. SORTIE: 26/08.

Dans le Focus du 21 août, notre interview de Jacques Audiard.

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