Critique

Un monstre à Paris

ANIMATION | Avec le Paris des années 1910 pour toile de fond, Bibo Bergeron signe un film d’animation au charme désuet et enchanteur, en prise détournée sur le conte…

De Cocteau à Disney, en passant par Cooper et Schoedsack pour King Kong, c’est peu dire que La Belle et la Bête a inspiré les adaptations les plus diverses. L’histoire -ou plutôt le mytheest pratiquement inépuisable, il est vrai; démonstration, aujourd’hui, avec Un monstre à Paris, film d’animation d’Eric « Bibo » Bergeron, co-réalisateur, à l’époque où il travaillait pour les studios DreamWorks, de Road to El Dorado et Shark Tale.

Par la grâce d’une mise enabîme toute en douceur, le film nous emmène dans le Paris des années 1910, en proie à des inondations sans précédent. C’est là que l’on découvre Emile, un jeune projectionniste timide, et Raoul, son ami livreur, avec qui il sillonne les rues de la Ville Lumière. L’une de leurs expéditions les emmène dans le laboratoire d’un inventeur, où le duo maladroit, assisté dans son entreprise par un singe peu savant, va provoquer une petite catastrophe, libérant une puce monstrueuse dans la nuit parisienne. Il n’en faudra guère plus pour tétaniser le bon peuple, ni pour attiser l’ambition du préfet Maynott, espérant retirer de conséquents dividendes électoraux de la capture éventuelle de la Bête. Laquelle aura entre-temps été recueillie par Lucille, chanteuse-star du cabaret L’oiseau rare, objet des attentions conjuguées et rivales de Raoul et Maynott, et pas insensible au petit grain de voix du monstre…

Le retour d’Adèle Blanc-Sec

Plusieurs annéess ont été nécessaires à Bergeron pour mener à son terme un projet pour lequel il a reçu le concours d’EuropaCorp, la société de Luc Besson. D’où, peut-être, le petit côté Adèle Blanc-Sec, en version enfantine s’entend, d’un film dont les décors, ceux du Jardin des Plantes en particulier, ne sont pas sans évoquer l’imaginaire d’un Tardi. Cette palette graphique est assurément l’une des plus belles réussites d’Un monstre à Paris, le film dispensant en charme désuet, que prolonge une animation toute de fluidité classique, touchant par endroits à la magie pure -ainsi lorsque Belle et Bête entament un duo qui les emmènera en bord de Seine. Les chansons de Matthieu Chedid donnent son ossature musicale au film en effet, les duos de M avec Vanessa Paradis s’avérant joliment habités -voilà qui change agréablement de la guimauve dégoulinante qui sert habituellement d’accompagnement au cinéma d’animation. Le reste, qui revisite le mythe sur un mode inspiré et poétique, achève de faire de ce divertissement familial un moment exquis.

Seul bémol, mais de pure forme à vrai dire: la 3D est ici à ce point galvaudée que Bergeron ne fait même pas mine de s’en servir. On y verra donc un pur effet d’appel, bien inutile au demeurant: enchanté, comme pouvait l’être le cinéma de Jacques Demy, et non moins résolument enchanteur, Un monstre à Paris se suffit largement à lui-même.

Jean-François Pluijgers

UN MONSTRE À PARIS, FILM D’ANIMATIN DE BIBO BERGERON. AVEC LES VOIX DE VANESSA PARADIS, GAD ELMALEH, FRANÇOIS CLUZET, M. 1 H 20. SORTIE: 12/10. ****

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