Critique

Lincoln

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Jean-François Pluijgers
Jean-François Pluijgers Journaliste cinéma

BIOPIC | Appartenant à la veine « sérieuse » de Steven Spielberg, et s’inscrivant dans la lignée d’un Amistad, Lincoln témoigne d’un net regain d’inspiration.

DE STEVEN SPIELBERG. AVEC DANIEL DAY-LEWIS, TOMMY LEE JONES, DAVID STRATHAIRN. 2H30. SORTIE: 23/01. ***

BIOPIC | Deux axes président à la filmographie de Steven Spielberg, qui l’ont vu alterner purs divertissements et oeuvres adultes, passant sans douleur de Jurassic Park à Schindler’s List. Ou, tout récemment encore, de The Adventures of Tintin à War Horse, des films aux ambitions artistiques divergentes qui avaient toutefois en commun de traduire un essoufflement manifeste. Appartenant à la veine « sérieuse » de l’auteur, et s’inscrivant pour sa part dans la lignée d’un Amistad, Lincoln témoigne, à cet égard, d’un net regain d’inspiration. Cédant à son tour à la veine du biopic, Spielberg s’attache à la personnalité d’Abraham Lincoln (Daniel Day-Lewis), seizième président des Etats-Unis, élu en 1860, puis réélu quatre ans plus tard, avant d’être assassiné en avril 1865.

Austère, mais captivant

Situant son récit au plus fort de la guerre civile américaine, le réalisateur s’arrête plus particulièrement au combat mené par le Président pour tenter de faire passer l’amendement à la constitution abolissant l’esclavage et, partant, faire cesser les hostilités ravageant la nation. La matière est austère, le tour de force de Spielberg est d’avoir su en tirer une oeuvre captivante, ménageant le suspense en dépit d’une issue connue, sans, pour autant, céder en rien à la facilité. S’il s’ouvre en effet sur la bataille de Jenkins’ Ferry, laissant brièvement augurer d’un film étant à la Guerre de Sécession ce que Saving Private Ryan fut au débarquement de Normandie, Lincoln se révèle bientôt tout autre qui, en guise d’action, s’en tient, pour l’essentiel, à des machinations en coulisses (les arguties sinueuses d’un Lincoln volontiers chafouin ne sont pas l’aspect le moins fascinant de l’affaire) et autres joutes oratoires divisant le Congrès américain. Ne s’autorisant que d’épisodiques respirations (familiales pour l’essentiel), le huis clos qui s’ensuit est passionnant, dont les enjeux transcendent largement le cadre historique, tant il est vrai que ce combat exemplaire a posé les fondements de l’Amérique d’aujourd’hui.

Mais si le film, un brin bavard, tient inévitablement de la leçon d’Histoire -portant aussi sur le fonctionnement de la démocratie américaine, toujours d’actualité, même si le rapport Républicains-Démocrates s’est depuis inversé, celle-ci n’occulte pas pour autant sa dimension humaine. Le maître-atout du réalisateur s’appelle d’ailleurs Daniel Day-Lewis qui, marchant sur les traces de Henry Fonda, se révèle sidérant dans le rôle-titre, un homme dont il restitue la complexité, tout en l’habitant d’une force de conviction peu banale, où pointe le soupçon de malice qui fait la différence. Magistral, l’acteur achève de faire de Lincoln une réussite que soutient par ailleurs une distribution quatre étoiles, où brillent encore David Strathairn, Tommy Lee Jones ou le revenant James Spader, impliqués à des titres divers dans ce gigantesque bras de fer politique. Sobre et puissant, un biopic classique dans sa facture et intemporel dans son propos.

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