[critique ciné] The Green Knight: un homme face à son destin
Le réalisateur texan David Lowery adapte le roman de chevalerie Sire Gauvain et le Chevalier vert dans un fascinant film crépusculaire.
Révélé il y a une demi-douzaine d’années par Ain’t Them Bodies Saints, un film où il revisitait de très personnelle façon la figure des amants en cavale, David Lowery a suivi, depuis, un parcours sinueux qui l’a vu livrer successivement un film d’aventures Disney (Pete’s Dragon) et une méditation aux accents cosmiques (A Ghost Story), avant d’offrir à Robert Redford des adieux dignes de sa légende dans The Old Man & the Gun. Rarement là où l’attend, le réalisateur texan s’attaque aujourd’hui à un classique du roman de chevalerie, Sire Gauvain et le Chevalier vert. Un récit rédigé à la fin du XIVe siècle, déjà adapté au cinéma en diverses occasions sans qu’aucune n’ait laissé de souvenir impérissable, qu’il amène aujourd’hui en terrain aussi surprenant que fascinant.
L’action se déroule à la cour du roi Arthur où Gauvain (Dev Patel), le neveu du monarque siège parmi les chevaliers de la Table ronde. Et débute lorsque le jeune homme, désireux de prouver sa valeur, accepte de relever le défi posé par un mystérieux et imposant Chevalier vert, qui promet son arme à quiconque osera s’en saisir et lui en porter un coup, à condition toutefois de s’engager à subir la réciproque un an plus tard. Gauvain s’exécute et… décapite l’inconnu, qu’il a la surprise de voir se relever et partir avec sa tête sous le bras, non sans lui rappeler son funeste rendez-vous. Le temps passe et l’échéance se rapproche, le chevalier devant quitter son cocon douillet et la compagnie d’Essel (Alicia Vikander) pour partir à la rencontre de son destin. Et de s’enfoncer toujours plus avant dans une lande plongée dans une brume mortifère, horizon funèbre où il va lui falloir affronter brigands, fantômes, esprits facétieux et tentations, sans oublier ses propres démons…
Étrangeté assumée
La légende arthurienne a généreusement fourni l’heroic fantasy, un genre littéraire et cinématographique avec ses codes que David Lowery s’approprie, et remodèle à sa façon dans un film à l’étrangeté assumée. Si l’on retrouve là les figures classiques de la quête et de la mise à l’épreuve, sous-tendues par des valeurs telles que l’honneur et le sens du devoir, la geste de Gauvain se voit, devant sa caméra, dépouillée de toute esbroufe. À quoi le réalisateur préfère des limbes crépusculaires où le personnage -judicieusement incarné par Dev Patel, qui emmène une distribution où l’on retrouve Joel Edgerton, Anaïs Rizzo ou Barry Keoghan- semble évoluer à tâtons, le film opérant de manière hypnotique, voyage plus mental que physique en définitive. Si elle peut déconcerter, l’expérience, pour peu que l’on se laisse absorber par son faux rythme et son atmosphère spectrale, ne s’en révèle pas moins captivante, Lowery réussissant à réinventer ce conte fantastique médiéval sans le dénaturer. À voir.
Heroic fantasy. De David Lowery. Avec Dev Patel, Alicia Vikander, Joel Edgerton. 2 h 10. Sortie: le 04/08. ***(*)
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