Critique

[critique ciné] Black Widow: un récit d’empowerment particulièrement convenu

Nicolas Clément
Nicolas Clément Journaliste cinéma

Obsédé par le motif familial, le 24e film de l’univers cinématographique Marvel est un dispensable thriller d’espionnage en forme d’éternel retour aux sources.

Black Widow

C’est désormais la tendance, semble-t-il, chez Marvel: confier les rênes de leurs superproductions à des réalisateurs venus du cinéma indépendant. Après notamment Ryan Coogler (Fruitvale Station) pour Black Panther et avant une certaine Chloé Zhao (Nomadland) pour Eternals, c’est donc cette fois l’Australienne Cate Shortland (Lore, Berlin Syndrome) qui s’y colle. Situant son action dans la foulée directe des événements formant le coeur de Captain America: Civil War (2016), Black Widow développe la mythologie d’un personnage jusqu’ici largement sous-exploité par l’univers cinématographique Marvel: Natasha Romanoff, alias la Veuve noire (Scarlett Johansson). En fuite au bout du monde, celle-ci va devoir faire face à la part la plus sombre de son passé afin de déjouer une redoutable conspiration liée à sa vie d’avant les Avengers, sa fameuse famille d’adoption: une enfance difficile placée sous le signe du mensonge et de la dissimulation.

Réunion de famille

Passée une intro en flash-back singulièrement emphatique au son d’une reprise dégueulasse du Smells Like Teen Spirit de Nirvana, les grands axes de ce Black Widow ne tardent pas à se dessiner. Alternant de manière très systématique action bourre-pif, autodérision light et sentimentalisme baveux, le film, en effet, s’avance sous les traits d’un divertissement grand public dont les personnages, les situations, l’instinct voyageur et les inévitables courses- poursuites empruntent davantage aux codes du thriller d’espionnage qu’à ceux du film de super-héros -pas pour rien que Natasha Romanoff regarde Moonraker, dont elle semble connaître chaque réplique sur le bout des doigts, au début de cette nouvelle aventure doublée d’un désormais très prévisible récit d’émancipation au féminin pluriel.

[critique ciné] Black Widow: un récit d'empowerment particulièrement convenu

La meilleure idée du film? Confier le rôle de sa petite soeur d’adoption, Yelena Belova, à l’excellente Florence Pugh (Lady Macbeth, Midsommar, Little Women). Bouffeuse d’écran, cette dernière fait des étincelles en espionne badass qui relègue plus d’une fois Natasha/Scarlett au statut de simple faire-valoir. Moins frangines attachées par le sang, donc, que par un lien symbolique de sororité, ces deux-là unissent leurs forces pour combattre ce qui ressemble furieusement à un ersatz ruskov d’Harvey Weinstein, allégorie grosse comme un éléphant dans un magasin de porcelaine du vilain patriarcat. De quoi achever de faire de Black Widow un récit d’empowerment particulièrement convenu, qui remplit d’évidence son petit cahier des charges féministe avec davantage d’opportunisme que de sincérité. Voir notamment l’hypersexualisation éhontée dont la Veuve noire faisait encore l’objet dans de récentes productions Marvel…

FILM DE SUPER-HÉROS. De Cate Shortland. Avec Scarlett Johansson, Florence Pugh, Rachel Weisz. 2 h 14. Sortie: 07/07 (disponible par ailleurs dès le 09/07 sur Disney+). **(*)

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