Beyond the Steppes

© DR

Premier film émouvant de Vanja d’Alcantara, une jeune réalisatrice belge, « Beyond the Steppes » s’inspire d’une histoire vraie pour célébrer la résilience d’une femme sous l’oppression stalinienne.

Le premier long métrage est un exercice difficile. Plus encore quand l’inspiration en est tirée d’une mémoire personnelle ou familiale. Celui de Vanja d’Alcantara est une réussite appréciable pour la jeune (33 ans) réalisatrice belge, narrant l’aventure tragique survenue à une de ses grands-mères, décédée alors que la future cinéaste était encore adolescente.

L’histoire racontée par cette femme est celle d’une déportation, quand l’armée soviétique l’expédia, en 1940, de Pologne vers une région reculée de l’URSS où elle dut travailler sous surveillance dans une ferme collective. Son mari, officier dans les troupes polonaises, lui ayant été arraché par la guerre. Et leur bébé bientôt malade, à force de privations, requérant tous ses soins. Jusqu’à la faire s’enfuir, vers la steppe du Kazakhstan, en quête de remède pour l’enfant en danger…

Juste distance

Si la Nina du film est bel et bien un personnage de fiction, et si sa fuite avec des nomades kazakhs est née de l’imagination de la réalisatrice, l’expérience vécue par l’aïeule de Vanja d’Alcantara, et documentée par des recherches dans les archives historiques, aura très abondamment nourri le scénario.

La source très personnelle d’un récit qu’elle se sentait « comme un devoir de raconter » n’a pas empêché la jeune cinéaste belge de chercher et trouver une juste distance pour filmer. Loin de tout appel facile aux grands sentiments, avec une sobriété d’approche excluant les excès du mélo et ceux du spectaculaire, Vanja d’Alcantara sut affronter un tournage parfois difficile avec ce qu’il faut de lucidité pour faire oeuvre digne, retenue, d’autant plus émouvante qu’elle ne cherche pas systématiquement le chemin de nos larmes. La présence, dans le rôle principal, de l’actrice polonaise Agnieszka Grochowska est un atout majeur pour Beyond The Steppes. Son jeu concentré, sa présence caméra très prenante, servent idéalement un personnage de Nina s’exprimant autant, si pas plus, par les regards, le non-dit, que par les mots. La très belle photographie de Ruben Impens (le chef-opérateur de Steve + Sky et Turquaze, notamment) capte non seulement la singularité visuelle des décors naturels, mais restitue aussi leur climat, les conditions extrêmes dans lesquelles se déroule l’action.

Vanja d’Alcantara professe une grande admiration pour Marion Hänsel. Et l’on retrouve certaines qualités du cinéma de son aînée dans Beyond The Steppes. A commencer par un sens aigu des rapports entre souci de réalisme et portée romanesque. Et par un talent à tracer un portrait intime sur le canevas plus large de paysages faisant bien plus qu’assurer le décor. Deux des atouts majeurs de la réalisatrice de Dust, Si le vent soulève les sables et d’un Noir Océan bientôt à l’affiche. Comme Hänsel, d’Alcantara reconnaît l’appel de l’ailleurs comme un pas sur le chemin vers les autres mais aussi, en même temps, vers soi. Son premier long métrage, applaudi en compétition au récent festival de Locarno, la situe d’emblée parmi les jeunes talents à suivre d’un cinéma belge décidément riche en révélations.

Beyond The Steppes, de Vanja d’Alcantara, avec Agnieszka Grochowska, Aleksandra Justa, Borys Szyc. 1h23.

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Louis Danvers

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