Critique

Bande de filles, La Fureur de vivre déclinée au féminin black contemporain

Bande filles © DR
Jean-François Pluijgers
Jean-François Pluijgers Journaliste cinéma

DRAME | A 16 ans, Marieme, jeune Black d’une cité de la banlieue parisienne, ressemble à un concentré de frustration, entre les contraintes domestiques imposées par le travail de sa mère, la loi que lui dicte son frère aîné, le regard du quartier, et l’on en passe; jusqu’aux perspectives scolaires que l’institution s’obstine à vouloir lui dénier.

A 16 ans, Marieme, jeune Black d’une cité de la banlieue parisienne, ressemble à un concentré de frustration, entre les contraintes domestiques imposées par le travail de sa mère, la loi que lui dicte son frère aîné, le regard du quartier, et l’on en passe; jusqu’aux perspectives scolaires que l’institution s’obstine à vouloir lui dénier. Moment où, alors qu’elle flotte au bord du décrochage, résonne le « T’as l’air vénère » qui va changer sa vie. Elles sont trois à lui faire face, Lady, Adiatou et Fily, une bande d' »affranchies » qui vont avoir tôt fait de l’adouber, et aux côtés desquelles Marieme, métamorphosée en Vic, va embrasser l’existence avec la fougue de son âge.

Avec Bande de filles, c’est un peu comme si Céline Sciamma déclinait La Fureur de vivre au féminin black contemporain. Vibrant d’une intensité peu banale, posée dès sa scène d’ouverture -un entraînement de football américain dynamité au son de l’électro de Para One- pour ne plus se relâcher par la suite, le film réussit à capter quelque chose de l’énergie et de l’éphémère adolescents. Mais, de même que son héroïne refuse de se conformer à la voie que l’on voudrait lui tracer, la réalisatrice échappe aux carcans du « teen movie », tout en désamorçant ceux du film de banlieue, pour signer une oeuvre singulière, dans la continuité de Naissance des pieuvres et Tomboy. C’est toujours de la construction de l’identité qu’il est en effet question, le groupe faisant office de catalyseur, dans une dynamique que Sciamma prend à bras-le-corps, tout en affirmant un sens aiguisé de la mise en scène. En découle un film spontané et réfléchi à la fois, se jouant des clichés pour leur préférer audace et fulgurances (ainsi de la scène du Diamonds de Rihanna), et porté par un quatuor d’interprètes inoubliables, Karidja Touré crevant l’écran dans le rôle principal. Soit un grand moment de cinéma, urgent et fort.

  • DE CÉLINE SCIAMMA. AVEC KARIDJA TOURÉ, ASSA SYLLA, MARIETOU TOURÉ. 1 H 52. SORTIE: 22/10.

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