L’oeuvre de la semaine: Sois jeune et tais-toi

Pieter Jennes, Sois jeune et tais-toi, 2018, c de l'artiste et gallery Sofie Van De Velde © Pieter Jennes
Guy Gilsoul Journaliste

Le peintre anversois Pieter Jennes (né en 1976) était jusqu’il y a peu parfaitement inconnu. En réalité jusqu’à l’heure de la foire de Rotterdam puis de celle de Bruxelles qui révélèrent ce travail à la fois hors de son temps et très actuel.

A première vue, l’homme pourrait passer pour un imagier léger prenant plaisir à ironiser sur le monde qui l’environne. En teintes de roses éteints, ses héros sont des oiseaux, des hommes déguisés en éléphant ou encore des assemblées où l’on cause autour d’une table.

Pourtant, en revenant vers la peinture, car notre homme est un vrai peintre, on devine un héritier. On serait prêt à évoquer Edgard Tytgat pour sa façon de regarder en conteur, tout à la fois le monde extérieur et celui d’une certaine histoire de l’Art. La proximité avec les harmonies chromatiques du peintre bruxellois, ses textures, son traitement des perspectives redressées et les raccourcis anatomiques auréolent l’oeuvre du jeune artiste d’un même parfum d’évidence parfois taxée de naïveté. Ne nous y trompons pas. Car le monde a changé et Jennes est bel et bien de plein pied dans le nôtre.

A l’heure de Tytgat dont le M Museum de Louvain nous offrait voici peu, une vaste rétrospective, l’esthétique moderne ne pouvait que passer par les leçons du cubisme, ce dont tous les expressionnismes, celui de Tytgat inclus, se sont nourris. Mais il suffit de comparer la toile de Jennes « Sois jeune et tais-toi » avec celle célébrissime du « Vieux guitariste aveugle » du Picasso de la période bleue » pour noter qu’aux angles vifs articulés par le maître espagnol ont succédé chez Jennes, la danse presque lascive des courbes.

Une sorte de mise à distance qui s’apparente davantage à l’univers du peintre actuel George Condo. Sauf qu’à la différence de l’artiste américain, l’humour chez Jennes n’est ni grinçant, ni frontal mais tout en nuances, voire en délicatesse. Jennes, comme Tytgat, n’en veulent pas au monde. Ils s’en amusent.

Galerie Sophie Van de Velde, Léon Styenstraat 21, 2018 Anvers. Jusqu’au 25 août Du mercredi au dimanche, de 14h à 18h. Site : sofievadevelde.be

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