L’oeuvre de la semaine: le magicien

Le Mori Cloud © Leandro Erlich, Galerie Baronian-Xippas
Guy Gilsoul Journaliste

 » Ce que vous voyez n’est pas « . Telle est le fil rouge des réalisations monumentales ou plus discrètes du quadra Leandro Erlich. Entre le travail du magicien et celui du rêveur, l’artiste argentin piège nos certitudes autant qu’il invite au dépaysement.

Ainsi quand, voici quelque temps, les promeneurs de Pais, Hong-Kong ou Buenos-Aires, rejoignant une plate-forme se voyaient, grâce à une immense feuille de miroir disposée devant eux à 45°, projetés sur la façade d’une maison où, selon leur attitude, ils s’accrochaient aux balcons, chutaient des corniches ou marchaient entre les étages le long du mur. Une autre oeuvre simulait une piscine dans laquelle il était possible de se promener sous l’eau sans se noyer ? Une autre encore piégeait le visiteur happé par un ascenseur « truqué » par les miroirs. Si les « fausses fenêtres » et d’une manière générale, la thématique des reflets changeants font aussi partie de ce corpus, les nuages occupent une place à part dans la mesure où nul n’est besoin de truquage pour provoquer l’illusion de celui, qui levant la tête, découvre dans ces masses blanches, là, une tête de chien, là, un profil d’homme… Chacun se souviendra sans effort avoir été confronté à ces masses fugaces qui, sur le fond bleu du ciel et d’un instant à l’autre, changent de forme pour le plus grand plaisir de nos imaginaires.

En superposant différentes plaques de verre ultra clair et en y injectant de l’encre céramique, Leandro Erlich propose dans l’exposition, sept sculptures sur socle noir qui, vues de face, happent notre regard et attisent aussitôt le récit. Ce sont bien de véritables nuages miniatures que l’on perçoit et dont on devine l’évanescence gazeuse alors qu’ils n’ont pour exister, ni besoin de fluides, ni de vapeur mais seulement de l’habileté d’un magicien dont la ruse se révèle sitôt la position frontale abandonnée. A la façon de vitrines muséales, ces nuages (les premiers ont été créés en 2012 à Buenos-Aires), s’inscrivent dans la logique d’une oeuvre qui, par-delà l’illusion, la perfection voire la beauté, vise avant tout à provoquer une relation entre le sujet (nous) et l’objet.

Knokke, Galerie Baronian-Xippas. 731 Zeedijk Het Zoute. Jusqu’au 2 janvier. Samedi et dimanche de 11h à 13h et de 14h30 à 18h30. www.baronianxippas.com

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