Critique danse: le roi Lion

© Dominique Henri
Estelle Spoto
Estelle Spoto Journaliste

Dans Lion, la chorégraphe Kyung-a Ryu convie le fauve d’un ancestral rite chamanique dans une pièce de danse contemporaine. Une union qui produit quelques images frappantes mais où la sauce ne prend pas vraiment.

Le lion du titre n’est pas une métaphore. L’animal est bien présent sur scène, même s’il ne s’agit évidemment pas d’un vrai fauve, mais du lion du Bukcheong, rite chamanique traditionnel de Corée censé chasser les mauvais esprits, né dans le nord de la péninsule avant d’y être interdit -aucune célébration ne peut venir faire de l’ombre au culte du chef de l’État-, seulement perpétuée au sud par une poignée d’amateurs. Deux d’entre eux, Dae-Chon Ahn et Young-uk Sun, de la troupe The Gwangdae, donnent vie à la pelisse et à l’impressionnant masque figurant la tête de la bête, dans un costume très proche de celui de la danse du lion exécutée traditionnellement en Asie lors du nouvel an chinois.

Dans ce Lion présenté en première ce week-end à la Raffinerie de Charleroi danse, l’intention de la danseuse chorégraphe et plasticienne coréenne basée à Bruxelles Kyung-a Ryu (Criss Cross, Clouds and Thinking) était de mêler ce rite ancestral à la danse contemporaine occidentale, entrecroisant ainsi deux manières de concevoir le monde. Soit l’une où l’être humain occupe une position centrale et dominante et une autre où l’homme se montre plus humble, reconnaissant des forces, visibles et invisibles, qui le dépassent. Sur une hybridation semblable, Ayelen Parolin avait créé en 2016 l’époustouflant Nativos, recyclant le matériau chorégraphique d’Hérétiques avec des membres de la Compagnie nationale de danse contemporaine coréenne, la partition musicale croisant elle le piano percussif de Lea Petra et les percussions et chants traditionnels de Yeo Seong Ryong. Un éblouissement.

Les attentes, trop grandes sans doute, ont été déçues ici. Si la scénographie centrée autour de trois cônes de rideaux orange illuminés de l’intérieur (évoquant peut-être une réalité parallèle, à la manière de la Red Room de Twin Peaks) intrigue et si le lion trouble parfois par la façon dont il passe de l’animal à l’homme en fonction des positions de ses deux manipulateurs, l’ensemble, lent et minimaliste, manque de cohésion, la musique, mix de bruits de la nature et de vagues électroniques, ne parvenant pas à soulever la danse.

Vu le 15 décembre à la Raffinerie de Charleroi danse.

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