Le réalisateur de Love Actually signe une comédie rock’n’roll ayant pour toile de fond les radios pirates. À l’abordage!

Année mythique. 1966, c’était l’âge d’or de la pop britannique. Et plus généralement une charnière dans l’histoire de la musique. Les Beatles dégainaient leur Revolver. Les Rolling Stones donnaient vie à leur premier album intégralement composé de chansons originales. Simon and Garfunkel fredonnaient le Sounds of Silence. Dylan grillait Blonde on blonde et les Beach Boys nous caressaient dans le sens du poil avec Pet Sounds. A cette époque, pourtant, la BBC, en rupture avec son temps, ne diffusait en tout et pour tout que deux heures de rock par semaine.

D’autres s’en chargeaient à sa place. Dans l’illégalité. Phénomène frappant essentiellement le Royaume-Uni, les Pays-Bas, la Suède et le Danemark, les radios pirates firent découvrir au grand public des pans entiers de la musique moderne. Des Kinks à Janis Joplin en passant par Jimi Hendrix, Dusty Springfield et Aretha Franklin.

Ces radios, pirates pour les autorités, libres pour ceux qui les écoutaient, Richard Curtis en a fait la toile de fond de son nouveau long métrage intitulé The Boat that rocked et traduit en… Good MorningEngland pour le marché francophone.  » La pop music est ce qui m’intéresse le plus au monde, lance-t-il pour engager la conversation . Mes s£urs étant plus âgées que moi, j’ai commencé à écouter de la musique très jeune. Elle m’obsède depuis que j’ai 7 ans. Nous vivions encore en Suède. Mon père n’avait que six disques à la maison: The King and I , My Fair Lady ou encore Nat King Cole… Un album coûtait cher à l’époque. Tu n’en recevais parfois qu’un seul et unique sur toute l’année. Comme cadeau de Noël. »

Opposées au monopole d’Etat sur la radiodiffusion, dépourvues d’autorisation, les radios pirates émettaient depuis les eaux internationales. Un moyen d’échapper, théoriquement du moins, aux réglementations en vigueur. Ces stations, la plupart du temps installées en mer du Nord, proposaient des programmes adaptés aux attentes de la jeunesse. Vers le milieu des années 60, elles jouèrent un rôle plus que significatif dans l’essor des nouvelles formes de musique populaire.

Radio Caroline était l’une des plus célèbres d’entre elles. Trois semaines après sa création, la station qui retransmettait en continu des programmes de musique anglo-saxonne était créditée de 10 millions d’auditeurs selon les sondages officiels. Le gouvernement britannique fit de son mieux pour empêcher ces transmissions illégales qui rythmaient la vie des Anglais et berçaient leurs foyers.

En douce

Quand on dit radios pirates, on pense immédiatement oreiller, revoyant ces images de gamins planqués sous leur coussin, le transistor collé à l’oreille. Richard Curtis aussi se cachait sous les draps.  » Mes parents étaient très libéraux et pourtant je me souviens avoir souvent écouté la radio en douce. Je mettais le son tout bas pour qu’ils ne l’entendent pas en passant devant ma chambre. A l’époque, quand on allait au lit, on y allait pour se coucher. Dans le même état d’esprit, je ne veux pas que mes enfants aient une télé dans leur chambre. Ecouter de la musique était malgré tout, dans le temps, une expérience plus collective qu’aujourd’hui. On passait des soirées entières à écouter des disques. Quand ma fille retrouve ses copines, elle passe plutôt son temps à regarder des films. »

Animées par beaucoup d’Américains et d’Australiens  » personne en Grande-Bretagne ne savait trop comment faire », les radios clandestines reflètent aussi – certains diraient surtout – l’âpre combat pour la liberté d’expression.

 » Je ne connaissais pas grand-chose des radios pirates, admet le réalisateur . Et je n’ai pas non plus fait beaucoup de recherches sur le sujet. Elles m’auraient emmené vers un autre type de film que celui auquel j’aspirais. Je me suis essentiellement basé sur ce que je savais. Je les écoutais. Je me souviens de l’atmos-phère qui s’en dégageait. Je me souviens des bateaux au large. Je ne voulais pas réaliser un documentaire. Ni même m’en approcher. Je voulais tourner un film qui soit pop du début à la fin. Et j’ai imaginé le quotidien de huit mégalomaniaques, huit célèbres disc-jockeys obligés de vivre ensemble en circuit plus ou moins fermé. » l

Texte Julien Broquet

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