Titre - Emmanuelle
Genre - Drame érotique
Réalisateur-trice - Audrey Diwan
Casting - Noémie Merlant, Will Sharpe, Naomi Watts
Durée - 1h57
Dans Emmanuelle, Audrey Diwan embarque Noémie Merlant dans une quête sophistiquée et lancinante de sens par les sens.
Journaliste, éditrice, écrivaine… Depuis une grosse quinzaine d’années, la Française d’origine libanaise Audrey Diwan s’est surtout imposée comme une scénariste incontournable du paysage hexagonal: la série Mafiosa, les films de son ancien compagnon Cédric Jimenez (La French, HHhH, BAC Nord), L’Amour et les Forêts de Valérie Donzelli, Visions de Yann Gozlan, Pas de vagues de Teddy Lussi-Modeste, l’imminent L’Amour ouf de Gilles Lellouche… Dès 2019, elle se lance par ailleurs dans la réalisation de longs métrages qu’on devine plus personnels et où le destin des personnages se joue dans un rapport très fort à la vérité de leur corps: l’addiction à la cocaïne dans Mais vous êtes fous avec Pio Marmaï et Céline Sallette (2019), la douleur d’une grossesse non désirée dans L’Événement adapté d’Annie Ernaux (2021)… Son adaptation d’Emmanuelle, le célèbre roman érotique d’Emmanuelle Arsan, un demi-siècle exactement après celle de Just Jaeckin avec Sylvia Kristel et son fauteuil en rotin, vient aujourd’hui s’inscrire dans cette même quête d’un cinéma qui part de l’organique.
Parfaitement, et très subtilement, raccord avec les questionnements féministes de l’époque en lien avec la sexualité, le film, écrit en compagnie de Rebecca Zlotowski (Grand Central, Une fille facile, Les Enfants des autres), cueille le personnage d’Emmanuelle (Noémie Merlant) au moment où elle se rend seule à Hong Kong pour son travail. D’une rigueur et d’un professionnalisme sans faille, elle y est chargée de contrôler la qualité d’un luxueux hôtel. Là, en quête d’un plaisir perdu auquel elle ne parvient jamais tout à fait à se reconnecter, elle va multiplier les expériences charnelles, mais fait surtout la rencontre de Kei, un homme mystérieux qui ne cesse de lui échapper…
Tout en désir et tension
Noyauter un drame érotique autour de la notion d’épuisement du désir: voilà une proposition de cinéma qui ne manque ni d’allure, ni d’intelligence, ni de profondeur. Travaillant habilement avec le hors-champ et le non-dit, tout en accordant une place prépondérante à la question du regard et des mots, le film maîtrise l’art de la suggestion pour mieux creuser une brèche, un espace physique mais surtout mental, dans l’obsession platement pornographique de l’époque. Au sein d’un univers impeccablement chic et ouaté, où le contrôle et l’absence d’abandon règnent en maître, Audrey Diwan ouvre progressivement les vannes de son cadre et de son personnage pour renouer, tout en trouble et tension, avec une certaine idée du lâcher-prise, qui s’apparente pour l’occasion à une véritable traversée du miroir. Pur film de mise en scène et de sensorialité, Emmanuelle version 2024 évoque un grand labyrinthe de passions éteintes avides d’être ravivées par goût du risque et du danger.
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