Critique | Cinéma

La Légende du roi crabe: une superbe fable sur la liberté et la culpabilité

4 / 5
© National
4 / 5

Titre - La Légende du roi Crabe

Réalisateur-trice - D’Alessio Rigo de Righi et Matteo Zoppis

Casting - Avec Gabriele Silli, Maria Alexandra Lungu, Severino Sperandio.

Durée - 1 h 46

Nicolas Clément
Nicolas Clément Journaliste cinéma

Entre Italie rurale et lointaine Terre de Feu, Alessio Rigo de Righi et Matteo Zoppis signent un superbe film-fable.

Cinéastes italo-américains nés en 1986, Alessio Rigo de Righi et Matteo Zoppis se connaissent depuis le collège. Ensemble, ils ont réalisé deux documentaires, le court Belva Nera (2013) et le long Il Solengo (2015), caractérisés à chaque fois par la présence d’un animal phare (une panthère pour le premier, un sanglier pour le second) et un goût affirmé pour les récits de la tradition paysanne. Passé par la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes en 2021 et aujourd’hui enfin distribué en Belgique à l’initiative du cinéma Nova, à Bruxelles, La Légende du roi crabe, leur premier long métrage de fiction, s’inscrit dans la continuité directe de ceux-ci, se choisissant un crustacé comme boussole animale et jouant des inévitables imperfections de la tradition orale comme sources d’histoires sans cesse renouvelées.

Le récit s’enclenche de nos jours, dans l’Italie rurale, où de vieux chasseurs tentent de se remémorer la légende de Luciano, ivrogne rebelle au look d’épouvantail désenchanté qui, à la fin du XIXe siècle, aime une femme en dépit des conventions et s’oppose sans relâche à la tyrannie du Prince de la province. Consumé par sa passion incandescente et son esprit de sédition, il finit par commettre l’irréparable. Contraint à l’exil dans la lointaine Terre de Feu, à l’extrême sud de l’Argentine, Luciano usurpe l’identité d’un prêtre et se met en quête d’un mystérieux trésor entouré de chercheurs d’or cupides, son odyssée fiévreuse prenant alors des allures de western métaphysique aux accents surréels…

L’affichage de ce contenu a été bloqué pour respecter vos choix en matière de cookies. Cliquez ici pour régler vos préférences en matière de cookies et afficher le contenu.
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.

Structuré en deux parties bien distinctes, qui se complètent et se répondent, le film travaille les thématiques de la liberté et de la culpabilité mais en se gardant bien d’asséner de quelconques vérités. La Légende du roi crabe transpire en effet avant tout le plaisir qu’il peut y avoir à raconter des histoires et, plus encore, à s’y fondre. Ses promesses de trésor sont dans l’immersion pure, le baptême sans cesse renouvelé de récits qui évoluent et se transforment à chaque fois qu’ils sont transmis. On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve, dit-on, et ce n’est pas un hasard si cette merveilleuse fable de contrebande s’ouvre et se ferme dans des eaux scintillantes qui font boucle tout en vomissant le surplace.

Entre folklore rustique et appel irrésistible de l’aventure, La Légende du roi crabe crie son amour des grands espaces pour mieux embrasser la folie des hommes et la magie des rêves, floutant avec bonheur la frontière entre le vrai et le faux en compagnie d’acteurs pour la plupart non-professionnels. En chercheurs d’or patients, Alessio Rigo de Righi et Matteo Zoppis réconcilient ainsi le cinéma de Michelangelo Frammartino (Le Quattro Volte) et celui de Werner Herzog (Aguirre) dans une œuvre à la fois naturaliste et mythique, anti-hollywoodienne au possible.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content