Titre - Dalva
Genre - Drame
Réalisateur-trice - Emmanuelle Nicot
Casting - Zelda Samson, Alexis Manenti, Fanta Guirassy
Sortie - En salles
Durée - 1h20
Critique - Jean-François Pluijgers
Dans Dalva, Emmanuelle Nicot suit une fillette de 12 ans arrachée à son père incestueux pour tenter de se reconstruire. Un film viscéral et fort.
Premier long métrage d’Emmanuelle Nicot, Dalva est de ces films qui bousculent le spectateur. Postulat affirmé d’emblée, dans le chaos et la confusion présidant à une intervention policière au domicile d’un homme, emmené dans la nuit tandis que sa fille s’époumone, n’étant maîtrisée qu’à grand-peine: “Laissez-le!”. Cette fille, c’est Dalva (Zelda Samson, époustouflante), 12 ans mais un maquillage, une coiffure et des vêtements de petite femme, celle qu’avait façonnée son père incestueux dont elle vient d’être séparée.
Une situation qu’elle n’accepte pas plus qu’elle ne la comprend alors qu’elle est conduite dans un foyer pour mineurs de Givet afin d’y être prise en charge. Cadre qu’elle ne songe d’ailleurs qu’à fuir pour le retrouver, révoltée face à ceux qui l’ont arrachée à un homme avec qui elle vivait seule depuis des années et qu’elle aimait inconditionnellement, dont elle martèle qu’il ne lui a “jamais rien fait de mal”. Et murée dans le déni face à Jayden (Alexis Manenti), son éducateur référent, ou Samia (Fanta Guirassy), une adolescente au parcours tumultueux et au caractère bien trempé dont elle partage la chambre. Le début d’une trajectoire délicate, où il va lui falloir apprendre à se libérer de l’emprise pour pouvoir envisager de renouer avec son enfance et écrire sa propre histoire…
Récit d’apprentissage à rebours
Cet itinéraire douloureux, Emmanuelle Nicot explique avoir voulu en faire “un cheminement vers la lumière”. Son film, elle le situe après l’inceste, refusant tout voyeurisme sans en occulter pour autant l’impact traumatique. Pas plus, du reste, qu’elle ne se fait faute de démonter, tout en finesse, les mécanismes de l’emprise, au cœur de ce qui est aussi une expérience de cinéma viscérale. Filmé caméra à l’épaule, Dalva se déploie à hauteur de son héroïne, dont il épouse le point de vue exclusif, le recours au format 4/3 soulignant judicieusement le sentiment d’étouffement. S’ensuit un portrait à vif, quelque chose comme un récit d’apprentissage à rebours, où il s’agirait de déconstruire la femme fabriquée pour retrouver le naturel de l’enfance, trajet oscillant entre trouble et innocence auquel l’exceptionnelle Zelda Samson apporte une stupéfiante vérité. La révélation de la jeune comédienne, promise de toute évidence à un avenir radieux, se double de celle d’une cinéaste, Emmanuelle Nicot, qui livre ici un premier film auquel la rigueur de son approche comme la sobre vigueur de sa mise en scène confèrent une force peu banale. Non sans éviter avec brio les écueils du film à thème pour livrer une œuvre vibrante, drame inscrit dans un réel âpre, avec la reconstruction en ligne de mire. À voir absolument.
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