Titre - Daaaaaali!
Genre - Comédie
Réalisateur-trice - Quentin Dupieux
Casting - Avec Anaïs Demoustier, Édouard Baer, Jonathan Cohen
Sortie - En salles le 7 février 2024
Durée - 1 h 18
Suivant une logique onirique, Daaaaaali! de Quentin Dupieux n’a d’abord l’air de rien, mais finit par faire son chemin. Entêtant.
On se souvient que, dans le final d’Incroyable mais vrai (2022), Quentin Dupieux filmait déjà une main recouverte de fourmis, référence limpide à l’un des plans les plus fameux d’Un chien andalou (1929), joyau surréaliste imaginé par Salvador Dalí et Luis Buñuel. Il consacre cette fois carrément un film entier au premier, dans le plus pur style du second, en l’accommodant à sa propre sauce bien sûr, résolument pop et rigolarde. Dans Daaaaaalí!, concentré ludique d’absurde et d’onirisme, Dupieux se moque de l’ego surdimensionné de l’immense artiste espagnol tout en rendant hommage à la singularité et à la richesse de son univers créatif. Judith (Anaïs Demoustier), une journaliste française, est déterminée à interviewer le célèbre peintre (joué par différents comédiens, dont Édouard Baer, Jonathan Cohen, Pio Marmaï et Gilles Lellouche) mais, gagné d’une incontrôlable folie des grandeurs, ce dernier fait à chaque fois capoter la rencontre. Ils se retrouvent bientôt pris au piège d’une espèce de boucle temporelle qui semble vouloir les condamner au surplace…
Répétitions et variations
On voit déjà venir les détracteurs de Quentin Dupieux à des kilomètres: cette fois, c’est sûr, le cinéaste tourne en rond. Or c’est bien là précisément tout le génie du personnage: conscient, en auteur obsessionnel, de malaxer en permanence des idées fort semblables, il a toujours un coup d’avance. Et ouvre grand la porte de son processus créatif en intégrant à ses films la conscience qu’a son cinéma, réflexif et méta, d’être occupé à se fabriquer sous nos yeux. C’est d’évidence sa propre lassitude des interviews et l’inévitable bégaiement de son art que met ainsi en scène Dupieux dans Daaaaaalí!. Réflexion mi-potache et mi-angoissée sur la création, le film, qui tient autant du serpent qui se mord la queue que du malicieux puzzle surréaliste, joue des répétitions narratives, mais aussi d’infimes variations, pour dire l’inévitabilité de la redite tout en réaffirmant la possibilité d’en sortir. Flirtant plus d’une fois avec le foutage de gueule pur et simple du spectateur, Daaaaaalí! est ainsi également traversé de ponctuelles fulgurances imaginatives qui parasitent l’inlassable boucle et ouvrent sur des territoires inexplorés. Même si les nombreux paradoxes temporels du film et le narcissisme indécrottable de son protagoniste renvoient assez immanquablement à Réalité et au Daim, deux des plus grandes et indiscutables réussites du “système” Dupieux.
Film dans le film, rêve dans le rêve… Quentin Dupieux signe, avec Daaaaaalí!, une nouvelle œuvre gigogne qu’on aurait tort de snober. Le tout, sur une petite musique entêtante, qui n’a vraiment l’air de rien, de Thomas Bangalter, la moitié de Daft Punk. Taaaaaalent.
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