Cannes 2025: un festival qui reste une vitrine de choix pour le cinéma français

A Cannes, Léa Drucker (ici dans L’Intérêt d’Adam, de Laura Wandel, a prouvé qu’elle était une des meilleures actrices de sa génération.

Bien que le palmarès 2025 fasse la part belle aux cinémas du monde, le Festival de Cannes reste l’occasion de découvrir les films français qui feront l’actualité de la rentrée cinématographique…


Bien sûr, le Festival de Cannes est une magnifique vitrine du cinéma mondial, ouvrant toujours un peu plus ses portes à des films venus du monde entier, à l’image cette année de My Father’s Shadow, premier film nigérian présenté en Sélection officielle. Mais le Festival est aussi un moment très attendu pour le cinéma français, qui se taille la part du lion toutes sections confondues, avec une petite quarantaine de titres au compteur, des découvertes comme des grands noms, attendus au tournant.

C’était notamment le cas en compétition de Julia Ducournau, qui présentait son nouveau film après la Palme obtenue en 2021 pour Titane. C’est peu dire que l’accueil fut mitigé. Alpha est comme un cri dans le vide, un film plein d’effets mais qui après coup fait peu d’effet, si ce n’est la frustration d’avoir vu à l’œuvre une cinéaste talentueuse perdue dans son concept.

Léa Drucker s’impose décidément comme l’une si ce n’est la meilleure actrice française de sa génération.

En 2022, Thierry Frémaux avait eu le nez moyennement creux en programmant La Nuit du 12 dans la section Cannes Première, jugeant qu’il s’agissait d’une «œuvre mineure» de son auteur, Dominik Moll. Au vu du succès critique et public remporté par le film (lauréat notamment du César du Meilleur film), on imagine qu’il n’était pas question pour lui de reproduire la même erreur, aussi Dossier 137 était sélectionné cette année en compétition. Le cinéaste français livre un nouveau film d’enquête, décortiquant du point vue d’une inspectrice de la police des polices un cas de violence policière en marge d’une manifestation des Gilets Jaunes. Si le film a la vertu d’aborder frontalement cette question, il reste modeste dans son dispositif cinématographique. Il est néanmoins porté par une Léa Drucker qui au vu de cette prestation, et de celle offerte dans L’Intérêt d’Adam de la Belge Laura Wandel, présenté en ouverture de la Semaine de la Critique, s’impose décidément comme l’une si ce n’est la meilleure actrice française de sa génération.

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Le troisième film français de la compétition était celui d’Hafsia Herzi, La Petite Dernière, qui a valu à sa jeune comédienne, Nadia Melliti, dont c’était le premier rôle, le Prix d’interprétation. Une quête d’identité, mais aussi un film d’amour lesbien, dont la projection, et notamment les scènes de fête, a électrisé la Croisette. A travers le parcours de Fatima, dont la singularité va trouver au fil du récit une vraie communauté où s’épanouir, le film contribue à une normalisation cinématographique bienvenue des amours lesbiennes, à l’image de deux autres titres qui ont marqué les esprits, chacun dans leur genre, Love Me Tender, avec Vicky Krieps, d’Anna Cazenave Cambet, montré à Un certain regard, et Des preuves d’amour d’Alice Douard à la Quinzaine des Cinéastes. On a pleuré avec l’héroïne du film, qui questionne sa maternité à venir alors que sa compagne est sur le point d’avoir leur enfant, mais on a ri aussi avec elle.

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Et justement, la comédie nous a surpris au détour de quelques propositions séduisantes mais pas toujours abouties. A la Quinzaine, la Québécoise Anne Emond osait avec Amour apocalypse la comédie romantique au masculin, la mâtinant d’une bonne dose d’éco-anxiété. Dans la même section, le public a ri à gorge déployée devant Classe moyenne d’Anthony Cordier, l’affrontement à mort ou presque d’un couple d’ultra-riches et de leurs employés de maison, incarnés par les très drôles Laure Calamy, Elodie Bouchez, Ramzi Bedia, et Laurent Lafitte, ce dernier étant également à l’affiche de La Femme la plus riche du monde de Thierry Klifa, présenté hors compétition, où Isabelle Huppert incarne une magnat des affaires inspirée de Liliane Bettencourt, tandis que Lafitte joue son flamboyant toy boy, photographe arriviste qui vit sa vie comme sur la scène d’un théâtre de boulevard.

Même Rebecca Zlotowski, plutôt portée sur le drame, plongeait Jodie Foster et Daniel Auteuil dans une comédie bourgeoise psychanalytico-allénienne dans Vie privée, montrée également hors compétition. Quelques éclats de rire bienvenus dans un festival qui a parfois pu sembler paralysé face à la charge mortifère de l’actualité.

3 questions à… Pauline Loquès

L’une des surprises du Festival est venue de Nino, premier long métrage de Pauline Loquès, présenté à la Semaine de la Critique, qui a valu un prix d’interprétation à Théodore Pellerin. Le film suit les 48 heures d’errance d’un jeune homme entre le moment où il apprend qu’il a un cancer, et le début précipité de son traitement. Comment faire face à une nouvelle qui change, voire qui hypothèque votre vie? Avec qui la partager? Nino sortira en Belgique le 17 septembre prochain.

Qu’est-ce qui a fait jaillir cette histoire?
C’est parti d’une histoire personnelle. J’ai perdu quelqu’un dans ma famille, un jeune homme emporté par un cancer très agressif, fulgurant. J’ai été sidérée, très en colère, et très triste. Je me suis mise à écrire au départ de façon presque thérapeutique. J’ai imaginé un personnage qui recevait un diagnostic similaire, que je souhaitais amener vers la lumière. J’avais le point de départ et le point final, sans savoir ce qui allait se passer entre. Je me suis laissée guider par Nino, au gré de son errance, et de ses rencontres.
Le film est forcément tragique, mais d’une grande douceur, avec des accents comiques souvent, tant le rapport aux autres est complexe.
Ce mélange me vient naturellement. Quand il y a un drame, je vois toujours un petit truc drôle dedans. Quand il y a des moments qui ont l’air joyeux, j’y vois aussi de la mélancolie. L’une des quêtes de Nino, c’est dire sa maladie. Beaucoup de gens qui ont eu des cancers m’ont dit que ce qui était terrible, c’est que quand on en parle, personne n’est jamais à la hauteur. Parce que personne ne peut l’être. Le film raconte cela, personne ne peut vivre son expérience à sa place, en revanche, il peut choisir qui l’accompagnera.
Comment votre choix s’est-il porté sur Theodore Pellerin?
J’ai écrit sans avoir de comédien en tête. J’aimais bien que Nino garde des contours un peu flous. Je voyais un garçon aux vêtements larges, avec un phrasé un peu hésitant. C’est ma directrice de casting qui m’a parlé de ce jeune acteur québécois de 25 ans, alors que moi je cherchais un trentenaire parisien. Quand il s’est présenté, j’ai eu un vrai coup de cœur. Théodore est fort, vaillant, mais il a une grande délicatesse. Il ne s’excuse pas d’être sensible, sans en jouer pour autant. Il est d’une sincérité désarmante, et il a un vrai génie du jeu, quand on le voit on n’a pas l’impression qu’il joue, et pourtant il travaille beaucoup.


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