Titre - Bird
Genre - Drame
Réalisateur-trice - d'Andrea Arnold
Casting - Avec Nykiya Adams, Barry Keoghan, Franz Rogowski.
Durée - 1 h 58
Bird, le nouveau film d’Andrea Arnold, est un conte de fées social, où brille Barry Keoghan en père immature et désinvolte.
Dans Fish Tank (2009), Andrea Arnold capturait le désir brut d’une adolescente à la dérive. Dans Les Hauts de Hurlevent (2011), elle a traîné la romance d’Emily Brontë à travers la boue des landes du Yorkshire. Dans American Honey (2016), elle a filmé un road trip extatique rempli d’hédonisme juvénile. Et même dans le documentaire sans paroles Cow (2022), elle a donné à une vache plus de personnalité qu’à beaucoup d’êtres humains. Voici maintenant Bird (lire le dossier en page 8), un conte de fées social qui, une fois de plus, porte indéniablement un sceau de qualité, même s’il s’agit peut-être de l’œuvre la moins aboutie d’Arnold.
L’histoire -tirée de souvenirs et de rêves d’enfance- se déroule dans les ruelles du Kent, où même le soleil se demande ce qu’il fait exactement dans ce trou. Bailey, une ado de 12 ans au regard qui vous déchire le cœur, tente de naviguer entre son père Bug (Barry Keoghan, en éternel adolescent aux tatouages d’insectes), dealer de drogue, et sa mère distraite, prisonnière d’une relation abusive. C’est une vie pleine de violence, de fêtes, d’émeutes et de crapauds tropicaux délivrant une bave hallucinatoire, jusqu’à ce qu’apparaisse soudain Bird (Franz Rogowski), un personnage mystérieux -à la fois vagabond et créature magique- qui dit être à la recherche de ses parents qui auraient autrefois vécu dans les environs. L’arrivée de ce Bird, ce drôle d’oiseau dans tous les sens du terme, offre à l’univers réaliste d’Arnold une touche de fantaisie, ce qu’elle n’avait jamais osé faire auparavant. Le résultat est fantasque, imprévisible voire carrément bizarre vers la fin, mais c’est précisément ce qui donne à Bird son âme frétillante. Arnold flirte avec un symbolisme tapageur -Rogowski apparaissant nu sur un toit a quelque chose d’un ange déchu- mais reste surtout fidèle à son plus grand talent: capturer la soif de vivre des jeunes dans un monde immature qui fera tout pour éteindre cette flamme. De plus, Bailey, interprétée par la désarmante nouvelle venue Nykiya Adams, s’avère être un personnage typique du cinéma d’Arnold: têtue, vulnérable et inflexible à la fois.
Poésie brute
Sur le plan visuel, le film fait tout ce que l’on attend d’une collaboration entre Arnold et son directeur de la photographie Robbie Ryan: la caméra danse au rythme des personnages, ou au son de Blur et Coldplay en version karaoké. Les images sont à la fois brutes et poétiques, capturées dans une palette de couleurs ternes qui a néanmoins quelque chose de brillant par moments. Comme si, entre les squats et la côte du Kent, il y avait encore un peu de beauté à trouver, si l’on gratte bien. Bird est-il parfait? Non, pas du tout! L’équilibre entre le réalisme brutal et les soupçons de conte de fées vacille, et l’intrigue reste un patchwork d’idées vagues et de dialogues improvisés. Mais même quand Arnold trébuche, elle tombe avec grâce. De plus, elle refuse de jouer la carte du misérabilisme, même si Bird contient son lot de tragédies marginales. « On ne peut pas contrôler la vie », dit Bird quelque part dans ce film dont chaque plan semble -malgré tout- imprégné d’une lueur d’espoir. Et c’est exactement ce que fait Arnold: laisser la vie se dérouler, sans filtre et sans artifice.
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici