Autrefois abondante, l’offre vidéoludique sur ordinateur s’étiole au profit des séduisantes consoles next gen. Analyse d’un bouleversement… à l’épilogue fatal ?

Joysticks, claviers et souris prennent la poussière depuis quelques années. Et la mordent. Des studios de développement aux rayons des magasins, le jeu vidéo PC tourne désormais au ralenti face à des consoles de salon next gen à l’impertinente santé. Jeu de tir à la première personne, Crysis comptait parmi ces (très) rares nouveaux titres qui avaient réussi à enthousiasmer la communauté PC ces derniers mois. Techniquement à la pointe, cette grosse production se solde finalement par un flop financier. Crytek jette l’éponge et annonce par la même occasion ne plus se concentrer sur des titres exclusivement dédiés au PC. Il rejoint ainsi une foule de studios qui ont préféré répondre au chant des sirènes du joypad.

Bien connu des maniaques de la souris et du clavier pour sa série des Unreal, Cliff Bleszinski d’Epic Games décrivait ainsi récemment une plate-forme PC « à l’abandon », avouant que les préoccupations principales de son équipe se tourneraient désormais vers les consoles. Son Gears Of War sur Xbox 360 en témoigne. Si Lucas Arts semblait avoir scellé son destin à celui du PC, le spectaculaire Star Wars: The Force Unleashed annonce également la rupture puisqu’on peut y jouer que sur téléviseur. Même son de cloche du côté de la tête pensante de Lionhead Studio, Peter Molyneux ( Black & White, The Movies, Fable) ou encore de Ralph Koster ( Ultima Online,Star Wars Galaxies) qui n’hésitent pas à parler de la mort du business model.

Panique au village

Des séries cultes quittent aussi le navire. Invisible War, la suite de Deus Ex ou encore Doom 3 annonçaient cette tendance il y a quelques années déjà. Le tsunami Grand Theft Auto IV et la future itération de Civili-zation Revolution la confirme. Et si comme beaucoup d’autres, ces titres jouent la carte du multiplateforme, figurant ainsi dans le catalogue Games for Windows, il ne faut pas s’y tromper, ils sont d’abord développés pour consoles. A l’image de nouvelles franchises à succès telles que Mass Effect ou Assassin’s Creed, leur adaptation sur PC n’est programmée qu’à posteriori. Avec comme corollaire navrant, un gameplay et une réalisation souvent inadaptés au PC.

 » De nos jours, l’offre est de 9 jeux consoles contre 1 sur PC alors que cette situation était inverse il y a dix ans« , résume amèrement Christophe Bikx, responsable des achats software et hardware chez Fnac Belgique. Une conclusion qui rejoint un bilan 2007 morose aux USA. Seuls 12 % des ventes de jeux vidéo en magasin se tournent vers l’ordinateur. A nuancer face à la montée en puissance de la vente de jeux PC en ligne, mais révélateur. Malgré les notables exceptions de World Of Warcraft – les Sims, SupremeCommander, Sin of a Solar Empire ou les futurs Warhammer Online, S.T.A.L.K.E.R.: Clear Sky et Starcraft 2 -, les exclusivités vidéoludiques PC se réduisent donc à peau de chagrin. Autrefois multiples, les approches de gameplay se cantonnent au MMORPG (jeu de rôle massivement multi-joueurs) ou aux RTS (stratégie temps réel). Le public se fascine donc moins pour la technique  » en avance sur son temps » qui collait autrefois à la peau des jeux PC.

Jeu en 3D, CD-Rom, fonctionnalités multimédias, multi-joueur en ligne, disque dur, résolution d’affichage LCD, communautés, mods, navigation Web… Tous les plus dont pouvait se vanter un joueur PC se sont progressivement étiolés depuis la première PlayStation. Et se retrouvent désormais en standard sur PS3, Xbox 360 et Nintendo Wii… Au-delà de la technique pure, le jeu sur PC a aussi perdu des plumes, faute d’une ergonomie fondamentalement renouvelée. Avec pour conséquence, une migration des genres de jeu. Autrefois apanage du PC, les simulateurs de conduite et FPS jouent désormais les stars sur les consoles.

Jeu pour pc le retour ?

Lassés par une surenchère à l’armement technique réservée à un public nanti, fatigués de devoir bidouiller Windows et agacés par la paresse des programmeurs, une bonne partie des hardcore gamers PC ont fini jeter la souris. Pour enrayer cette désaffection, la PC Gaming Alliance a été créée cette année. Elle regroupe quelques grands constructeurs et développeurs du secteur (Acer, Dell, Intel, AMD, Epic, Nvidia, Microsoft, Activision) désireux de mieux promouvoir le support, face à un marketing console très unifié et efficace. Alors que le piratage (1) se joint à cette danse macabre, Acer, Packard Bell, Dell et HP surenchérissent en PC spéciaux jeux vidéo. « Le jeu vidéo PC ne va pas mourir, martèle Phil McKinney vice-président également à la tête du développement technologique et jeu vidéo d’Hewlett Packard. Le fait est que les consoles next gen viennent de sortir et se montrent donc très compétitives face aux PC. Et vu que les développeurs essayent avant tout de livrer la meilleure expérience de jeu, il est logique qu’ils s’y intéressent. Le jeu sur PC se trouve dans le creux d’un phénomène cyclique constant. Quand le PC proposera une meilleure expérience, il reviendra au devant de la scène. » On attend de voir .

www.pcgamingalliance.org

(1) Un phénomène en grande partie responsable de la fin de l’Amiga et ainsi de l’âge d’or de la micro-informatique low cost dans les années 80.

TEXTE MICHI-HIRO TAMAï

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