Brecht Evens, un homme d’influences
Brecht Evens applique à la lettre la loi de Lavoisier: rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. Dans un dossier de son ordinateur, il stocke des centaines d’images glanées au fil de ses pérégrinations sur le Net et les réseaux sociaux. Estampes japonaises, reproductions d’art persan, planches anatomiques, couvertures de livres… Un cabinet de curiosités graphiques dont il s’inspire pour étoffer son propre univers. Zoom sur cinq infusions, et autant de témoignages précieux du fonctionnement du cerveau d’un artiste.
Nina touch
Fan du travail de l’artiste de bande dessinée flamande Nina Vandenbempt, Brecht Evens s’est inspiré de la composition d’un dessin de sa compatriote pour une double page très expressionniste. Séduit par le contraste entre les couleurs à l’avant-plan que font danser les personnages et le noir qui domine dans le fond, il a ajouté comme toujours sa touche personnelle, densifiant la scène et incrustant même des idéogrammes chinois dans le fond. Pour une autre vue panoramique des Rigoles, dans une discothèque cette fois, il a carrément demandé à Nina Vandenbempt un dessin original, qu’il a ensuite « brechtisé » comme il dit.
La Klee du succès
Ce personnage secondaire qui apparaît au détour d’une scène de foule dans le club où le personnage de Rodolphe a ses habitudes est le fruit d’une double influence. Sa robe reproduit fidèlement le motif d’une estampe japonaise sans doute tirée d’un recueil de dessins anatomiques comme il en existe beaucoup. Un créateur de mode appréciera le travail… Quant au visage rappelant un masque, Brecht Evens cite directement les marionnettes que l’artiste Klee réalisait pour son fils Felix, et dont l’expressivité à la limite du grotesque fascine le dessinateur.
Vagues à l’âme
Inutile parfois d’en rajouter pour faire de l’effet. Dans cette estampe japonaise, quelques ondulations suffisent à évoquer à la fois le mouvement de l’eau mais aussi un motif abstrait qui pourrait servir pour la pochette d’un groupe électro. Cette scène que Brecht Evens reproduit à l’identique sert à illustrer ou plutôt à suggérer les souvenirs que raconte l’un des trois personnages principaux. Un moment de pause et de méditation aussi dans un récit graphiquement virevoltant.
Costume sur mesure
Même s’il a le moral dans les chaussettes au début de l’album, Rodolphe n’en est pas moins l’ancien roi de la nuit. Il lui fallait donc une tenue qui sorte de l’ordinaire. Les personnages qu’il croise lors de sa chevauchée nocturne ne se doutent pas que son costume est en réalité inspiré d’un tableau naïf haïtien signé Gérard Fortune. Et encore moins que son surnom à Belleville, Baron Samedi, est le titre de ce tableau, qui fait référence à la culture vaudou…
Sous le signe de la résilience
Pendant les phases maniaques de son épisode bipolaire, Brecht Evens se jetait à corps perdu dans des projets sans lendemain. Il a ainsi envisagé un moment de faire le portrait du très populaire quartier Château-Rouge à Paris. Une multitude de dessins frénétiquement annotés témoignent de cette agitation. S’il a vite abandonné l’idée, il a repris le principe de la vue aérienne pour une scène de rue des Rigoles.
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